A Los Angeles
Guillaume Poiret, septiembre 2013
Cette fiche propose d’étudier Los Angeles, une ville construite par et pour les voiture. Son évolution en matière de mobilité s’est traduit ces dernières années par une densification permettant le développement de transports en commun (métro, bus en site propre), le changement de mentalité vis-à-vis de la voiture, le développement de l’auto-partage… Le renouveau de Down Town, le centre-ville, est un parfait exemple de cette évolution.
On l’a souvent écrit, Los Angeles est une ville construite par et pour la voiture, symbolique de l’urbanisme contemporain qui a conduit à un étalement toujours plus grand des villes. Sans doute faut-il nuancer quelque peu cette première remarque en ce que la première urbanisation de la ville se fait sous l’égide du tramway qui parcoure à l’époque le centre-ville. C’est après que les rails seront progressivement recouverts de bitume suite notamment à la décision dans les années 1920 de la population de refuser une densification du bâti, seule voie possible pour rentabiliser les investissements prévus sur les lignes. Les Angelinos ont préféré l’étalement et les déplacements en véhicule privé à toute structure urbaine dense reposant sur un vaste réseau de transports en commun.
Il est vrai, à ce titre, que l’entrelacs d’autoroutes larges, pouvant ainsi compter huit voies, dans la ville avec des jeux de bretelles sur parfois 4 étages laisse à voir un réseau dense où la voiture règne en maître. Les voitures ne représentent-elles pas plus de 80% des déplacements quotidiens des Angelinos ? Il est vrai de surcroît que la ville a remarquablement joué pour bénéficier de ces équipements. A emprunter ces autoroutes, appelées freeways, on constate que nombreuses sont celles à arborer un blason rouge et bleu tandis que le chiffre les désignant est précédé d’un I. Ce I signifie Interstate ce qui, en terme de financement et d’acteur, présuppose que ce soit l’État fédéral qui ait in fine assumé la construction de ce réseau. Los Angeles se contentant aujourd’hui d’en bénéficier. En d’autres termes, les possibilités d’extension de la ville sont avant tout le résultat d’investissements fédéraux. Ces investissements ont commencé dans les années 1940 avec la construction en 1940 de l’autoroute joignant Los Angeles à Passadena. En 1954 est proposé un vaste plan de réseau d’autoroutes axé sur des études réalisées dès les années 1930, il structurera de fait l’ensemble des interventions fédérales. Ce plan ne sera jamais réalisé complètement. A partir des années 1970, Los Angeles connait une remise en cause progressive de cette politique du tout-voiture notamment par les conséquences des aménagements autoroutiers. Riverains et habitants refusaient de voir arriver une autoroute de large dimension et se mobilisaient en conséquence, occasionnant l’arrêt des projets ou leur considérable diminution. La century freeway achevée en 1993 est ainsi la dernière grande autoroute de Los Angeles. De nos jours, l’État fédéral porte d’ailleurs davantage ses regards vers les projets de LGV qui semblent connaître un regain de dynamisme après avoir été âprement discutés pendant une vingtaine d’années.
Une simple autoroute en dit ainsi long sur le jeu d’acteurs complexe qui a dessiné le visage de la métropole actuelle. Emprunter ce réseau permet aussi de tordre le coup à une image d’Épinal souvent véhiculée, celle d’une Los Angeles étouffant sous les bouchons. La pollution atmosphérique se notifie certes clairement par la présence fréquente d’un smog au sein de la ville mais Los Angeles qui a inventé quasiment le concept de rush hours se révèle bien moins soumise aux congestions. L’Interstate 10 conserve assurément son qualificatif de voie la plus encombrée des États-Unis mais on circule relativement rapidement dans la ville, sur des distances considérables. Les temps changent ainsi, les comportements aussi. Les véhicules électriques ou hybrides sont plus nombreux quoique proportionnellement très minoritaires, les transports en commun voient les usagers augmenter.
La ville elle-même se densifie au point d’avoir désormais un réel Down Town à en croire les travaux lumineux de Samuel Krueger. Le long de Wilshire Boulevard, artère principale de la ville, du Down Town jusqu’à Santa Monica en passant par Korea Town et Beverly Hills se déroule ainsi un espace plus dense, fait d’immeubles et tours reliés par un métro (jusqu’à Korea Town pour l’heure, une extension étant prévue vers UCLA) et des bus rapides. Ce Down Town linéaire, espace de centralité primaire de la ville, est le fruit d’une politique de longue haleine menée par la municipalité et qui parait aujourd’hui porter ses fruits. Un travail sur les espaces publics et les infrastructures culturelles fut notamment conduit pour revivifier le centre-ville. Il fut soutenu par le Comté, l’État de Californie et l’État fédéral qui ont cofinancé et développé un réseau de transport en site propre destiné à assurer les déplacements des habitants. Los Angeles dispose ainsi désormais de six lignes de métro dont quatre en métro léger ainsi que deux lignes de bus en site propre. La première ligne la Blue line fut ainsi ouverte en 1990, l’Expo line est la dernière mise en service. Un vaste plan d’extensions est programmé et devrait aboutir à l’horizon 2025. Certains tronçons sont d’ores et déjà en construction.
Cela passe aussi par un progressif changement des mentalités. Les jeunes générations sont ainsi plus nombreuses à prendre le parti d’un déplacement sans voiture en choisissant des localisations le long des lignes de métro. La voiture d’individuelle devient aussi partagée avec la multiplication des ZIP cars. Il s’agit d’une structure présente dans plusieurs villes offrant la possibilité à ses adhérents, moyennant le paiement d’un abonnement la mise à disposition de véhicules normaux, disponibles en divers points de la ville, qui peuvent être empruntés pour une certaine durée (moins d’une journée en général).
Alors un jour un Los Angeles sans voiture ? Aucun acteur ne l’envisage sérieusement. Mais un Los Angeles où la voiture aurait une place différente, c’est aujourd’hui un thème en vogue tant chez les chercheurs de UCLA qu’au sein de la Metropolitan Transit Authority du Comté. Affaire à suivre.
Referencias
Pour accéder à la version PDF du numéro de la revue Tous Urbains, n°2
Plus d’informations sur les travaux de Samuel Krueger
Para ir más allá
Century freeway de Los Angeles(Californie)
DUPONT V. 2016. La renaissance de Down Town, Los Angeles, Le Monde.fr
Université de UCLA