« Base Commune » ranime les rez-de-chaussée d’immeubles

Carnet pratique n°16 : (Re) développer les activités productives dans les régions métropolitaines

Thierry Petit, novembre 2024

Institut Paris Région (IAU)

Base Commune, foncière solidaire labellisée ESUS (Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale), lutte contre les phénomènes de dévitalisation urbaine et de spéculation foncière en achetant des pieds d’immeuble pour y développer des occupations à impact social et.ou utilité locale. Ces rez-de-chaussée se veulent être de véritables lieux mixtes, ouverts sur le quartier et accessibles à une pluralité d’activités : ESS, commerces indépendants, services, artisanat, petits équipements, activités culturelles, associatives, solidaires… Autant d’activités à fort impact territorial qui sont pourtant exclues du marché immobilier traditionnel à cause des prix du foncier. C’est pourquoi Base Commune propose des locaux accessibles via un système de loyers différenciés et progressifs pour permettre à ces activités de s’installer de manière pérenne en ville. La mission de Base Commune est de transformer les rez-de-chaussée en de réels communs urbains.

À télécharger : cp16_ok_bat_web.pdf (7,3 Mio)

Base Commune, foncière solidaire née de la volonté de deux coopératives le Sens de la Ville et Plateau Urbain, intègre les compétences d’ingénierie et de conseil. Partant du constat que la vacance commerciale des rez-de-chaussée représente un enjeu majeur pour l’animation de la vie de quartier, son objet principal est d’acheter et de gérer des rez-de-chaussée d’immeubles pour y installer des activités à impact social et/ou d’utilité locale quand la cherté des loyers locatifs exclut les projets d’intérêt collectif. Les occupants peuvent être des commerces, des ateliers d’artisans ou des associations.

Elle assure également la commercialisation d’un lieu à la demande de tiers (collectivités, porteurs privés). Elle intervient principalement en Île-de- France, à Grigny sur un ancien centre commercial, à Paris en rez-de-chaussée d’immeuble dans la ZAC Paris Rive Gauche, à Massy (ZAC Massy-Opéra) ainsi qu’à Montereau-Fault-Yonne, dans une ancienne agence bancaire, sur de l’occupation temporaire, ou encore à Fontenaysous- Bois et à Champigny-sur-Marne pour l’implantation de boutiques à impact social.

Cette foncière propose des loyers décotés, jusqu’à un tiers du prix du marché, ou progressifs à mesure que le projet de l’entreprise gagne en capacité de financement (augmentation du chiffre d’affaires). Les baux peuvent être de type traditionnel 3/6/9, assortis de clauses sociales ou consister en un bail dérogatoire. Base Commune reste propriétaire des locaux sur longue période (minimum douze ans) pour garantir l’impact social du projet, ce qui n’empêche pas la revente du local au porteur de projet à un prix encadré pour éviter la spéculation.

Cette approche sociale se traduit aussi par la mise en place de critères de sélection des locataires basés sur l’impact social et local de leur projet, avec la volonté de créer un écosystème au sein du quartier. Le choix s’opère après une étude des besoins locaux, qui inclut en amont les acteurs du territoire (dont les collectivités). La sélection des biens s’effectue prioritairement sur des programmes immobiliers neufs avec tous types d’acteurs immobiliers. Ceux-ci sont de plus en plus ouverts, voire volontaires, pour ce type de transaction, car ils ont conscience qu’intégrer un acteur à impact social à leur dossier de candidature apporte un « plus » lorsque l’appel d’offres ne comporte pas déjà une clause de ce type, avec des prix de cession plafonnés.

Base Commune négocie ses prix de vente des rez-de-chaussée à un niveau garantissant l’équilibre financier des futures opérations. À l’avenir, elle envisage de racheter des locaux existants en lien avec les collectivités. Base Commune vise en premier lieu de grands lots (de 1 000 à 1 500 m²) pour y soutenir des projets fonctionnant en cluster de façon à rentabiliser le lancement de l’opération et la mise en place d’un service de gestionnaire de sites, qui en garantit le bon fonctionnement. Cette foncière cible en premier lieu des territoires jugés difficiles en première couronne, notamment des quartiers de type Anru. Cela ne l’empêche pas d’intervenir en coeur de métropole comme à Paris, porte de la Villette.

Organisée en SAS Esus, Base Commune peut bénéficier de financements publics (Banque des territoires, France Active, Terre d’Innovation…) ainsi que privés (Caisse d’Épargne). Son objectif est de se développer partout en France avec le rachat de 3 000 mètres carrés par an, réservés en priorité à l’accueil d’artisans. Base Commune fait partie d’un réseau informel d’acteurs oeuvrant dans des champs différents, comme la foncière Bellevilles avec laquelle la foncière a participé à la commercialisation d’une ancienne banque en pied d’immeuble à Montereau, Village Vivants, qui intervient dans les espaces ruraux, ou encore Biens Communs, une foncière immobilière plus axée sur le logement. D’autres acteurs agissent avec le même esprit, comme le néerlandais Camelot Europe, qui sécurise des locaux vacants par l’occupation temporaire, My Korner Shop, qui propose une forme de financement participatif pour acquérir des locaux commerciaux tandis que l’opération 1 000 Cafés redynamise des villages ayant perdu leurs commerces en rachetant les murs et en garantissant une rémunération (Smic) pour les gérants de commerces nouvellement créés.

Références

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