Outiller les acteurs
Outiller les acteurs de la transition dans les territoires c’est :
- a) leur permettre de participer à des communautés apprenantes où l’on progresse ensemble en tirant collectivement les leçons des expériences des uns et des autres ;
- b) se nourrir de l’expérience d’autres territoires dans les domaines les plus variés, en se laissant surprendre par la manière dont l’atlas nous entraîne sur des terrains auxquels on n’avait pas pensé ;
- c) clarifier sa propre pensée en mettant en mot les leçons de sa propre action ;
- d) ouvrir de nouvelles perspectives en renouvelant la manière de regarder la réalité ;
- e) disposer d’outils de dialogue entre acteurs d’un même territoire ;
- f) se former individuellement et collectivement."
Construire une communauté apprenante
Qu’est-ce qu’une communauté apprenante ?
Comment passe-t-on du collectif à la communauté et de l’idée fugace de l’échange d’expériences à la construction d’un commun ?
Une communauté c’est quoi ? Ça se caractérise au plan anthropologique par deux composantes fondamentales :
- la première : on partage un certain nombre de valeurs. Les communautés traditionnelles se définissent souvent par un ancêtre symbolique commun ou par un modèle culturel. Dans une communauté de praticiens militants, ce qu’on partage c’est ce dont on est porteur en commun.
- la seconde : la réciprocité. Ce qui définit en droit une communauté c’est le fait que chacun de ses membres est comptable de son impact sur les autres. Toute communauté se définit par une idée de réciprocité.
Ainsi, passer d’un collectif à une communauté, donc à une communauté apprenante, c’est partager des choses suffisamment fortes pour consacrer d’une certaine manière du temps aux autres ; du temps qui rapporte aussi à chacun.
Et que produit cette communauté ? un commun, c’est-à-dire quelque chose qui a besoin de tous pour être produit et pour être reproduit et qui va bénéficier à chacun . Pour produire et gérer un commun, il faut se mettre d’accord sur sa gouvernance : des règles d’exercice du pouvoir - comment on va animer cette communauté apprenante, qui pourra prendre les décisions etc..- ; des règles de contribution à la communauté ; des règles de droit d’usage du commun. C’est une dynamique qui s’inscrit dans la durée.
Voir aussi Enjeux, place, méthodes et défis de la capitalisation de l’expérience
Les buts
On se met ensemble pour faire quoi ? dans quel but ? En voici quatre qui sont, selon les communautés apprenantes, plus ou moins importants :
- Le premier but, c’est d’être soi-même plus pertinent dans son action. Comment ? La première, insoupçonnée souvent, c’est le fait qu’avoir eu à mettre en forme et à mettre en mots son expérience transforme son rapport au réel. Devenir plus pertinent c’est d’abord prendre des distances à l’égard de sa propre action, passer d’une posture d’acteur à une posture d’acteur penseur. Ensuite, c’est de découvrir, grâce au contact avec les autres, les éléments structurels de sa propre action et donc être mieux à même d’identifier, parmi les difficultés qu’on rencontre par exemple, celles qui sont communes à tous et ce qui est plus circonstanciel qui va pouvoir être contourné.
- Deuxième but, être plus crédible. Il est absolument fondamental de vous construire une légitimité de parole et cette légitimité de parole vient du fait que vous êtes nourri d’un collectif, que vous êtes détenteur d’un savoir et d’un savoir reconnu. Ce deuxième effet est souvent négligé mais capital : la légitimité de la parole.
- Troisième but, s’unir pour lever les blocages. L’action territoriale quelle qu’elle soit, ou toute autre action, se heurte à des modalités de régulation, de financement, d’exercice du pouvoir etc.. qui peut, constituer des blocages rendant difficile ou impossible une action vraiment pertinente. Quand une communauté est capable d’argumenter fortement sur le fait que ces blocages sont structurels, son pouvoir d’interpellation devient très fort.
- quatrième but, c’est le moyen de changer d’échelle avec les deux mécanismes possibles de changement d’échelle : "la boule de neige" ; la généralisation, rendue possible parce qu’on a pu construire ensemble un savoir directement transmissible et utilisable par les autres.
Les méthodes
Le cycle de médiation. Bâtir une communauté apprenante, c’est accepter de passer par un certain nombre d’étapes : le recueil de l’expérience, la capitalisation d’expériences, la diffusion d’expériences et sa mise en œuvre dans d’autres lieux.
- La première, le recueil de l’expérience, est paradoxalement la plus difficile. Il s’agit de transformer un vécu en une histoire transférable à d’autres. C’est pourquoi toute communauté apprenante nécessite un site web de ressources avec un format très strict de présentation des expériences. Il faut que l’on puisse repérer déjà des questions majeures qui vont se poser. Dans le démarrage d’une communauté apprenante, il ne faut pas sous-estimer le temps, l’énergie et souvent les réticences à la narration. Voir aussi La capitalisation d’expériences étape de la constitution d’une communauté apprenante
- La seconde étape, celle de la capitalisation proprement dite. C’est la recherche des principes directeurs, des invariants dans les éléments de réussite et dans les éléments d’échec entre toutes ces expériences. Voir aussi La capitalisation d’expériences, essentielle pour les territoires
- l’étape suivante, la diffusion d’expériences. Le premier support, et c’est la raison pour laquelle on l’a développé au sein de CITEGO, c’est un site ressources ; un lieu accessible de ces travaux. Dans notre philosophie, c’est un site accessible au public mais certaines communautés apprenantes peuvent décider d’en faire un commun privé accessible seulement aux membres de la communauté.
- la dernière étape, le mode de mise en œuvre des principes directeurs, avec deux débouchés : la formation ; l’élaboration des politiques publiques. Sur ce second, une politique nationale ou régionale n’a de sens que si elle peut s’appliquer à une très grande diversité de contextes ; de sorte que toute politique normalisatrice est inadaptée à cette diversité. Ce qu’on formule au niveau politique ce sont les principes directeurs, pas des solutions uniformes, à charge pour le niveau d’en dessous de mettre en œuvre ces principes directeurs au mieux de chaque contexte.
Au service des communautés apprenantes, nous avons développé quatre méthodes et outils :
- la fiche d’expériences et la manière de la rédiger ;
- le site web ressource qui doit être organisé et indexé de manière rigoureuse et qui repose sur une série de bases de données, en particulier les fiches d’expériences ;
- la méthode de construction collective des principes directeurs ; on a développé pour cela un logiciel libre, Desmodo, desmodo veut dire en grec « les liens », parce qu’on recherche au fond les liens, les points communs entre les expériences et l’important c’est que chacun se sente associé à cette identification ;
- quatrième outil, développé plus récemment, l’atlas relationnel. Il répond à un des grands problèmes posés aux communautés apprenantes et aux sites ressource : désigner ce dont on parle, pour permettre de le retrouver et surtout visualiser les liens entre tout ce dont on parle. Car si on veut gérer la complexité il faut au préalable être en mesure de se la représenter.
Recueillir et confronter les pratiques innovantes
CITEGO accompagne la capitalisation des expériences autour de pratiques innovantes. Ni évaluation, ni documentation, la capitalisation vise à permettre aux porteurs de l’expérience :
- d’apprendre de ce qu’ils font/ont fait en le formalisant,
- de confronter cette expérience au regard et à celle de ses pairs pour identifier ce qui peut être utiles à d’autres,
- de produire de nouvelles connaissances.
L’accompagnement à la capitalisation de l’expérience vise notamment la production de dossiers thématiques qui viendront enrichir le fonds documentaire. Le passage par l’écrit est en soi une étape du processus de réflexivité pour les acteurs, pour leur permettre de saisir ce qui s’est joué dans leur expérience, pour comprendre la trajectoire de changement et identifier les principes directeurs de ces expériences.
CITEGO apporte, selon les cas, un appui méthodologique, un regard extérieur, un regard innovant, une contradiction (pour bousculer et approfondir les réflexions) ou un appui rédactionnel. Il s’agit de dégager de la confrontation entre cas des principes directeurs, communs aux expériences, malgré ou en raison de la diversité des contextes.
L’un des instruments de cette capitalisation est le comité miroir qui réunit des expertises diverses tout au long du processus de production pour faciliter le questionnement et la prise de recul.
Valoriser l’expérience
Le fonds documentaire est la vitrine de la richesse de l’expérience acquise sur différentes problématiques touchant à la transition des territoires et à la gouvernance. Il peut être vu comme un dictionnaire vivant, interactif et réactualisé, qui permet à la fois d’apporter des contenus/connaissances, de les relier à d’autres sujets et de créer de nouveaux contenus.
Agrégateur et ordonnanceur de la diversité et de la richesse des ressources documentaires disponibles, il met à l’œuvre visuellement et techniquement le décloisonnement. L’ensemble des documents rendus disponibles sont ainsi indexés par l’atlas relationnel. Outil numérique de cartographie sémantique, l’atlas relationnel permet de « tirer les fils » des acteurs, des thèmes, des moyens d’action.
Les partenariats développés autour de la capitalisation de l’expérience permettent de produire des contenus qui pourront enrichir des entrées de l’atlas et donc le fonds documentaire.
Participer au développement de la connaissance tout en étant le plus en amont possible de sa production, pour faciliter son indexation et son rattachement à l’atlas est un enjeu pour CITEGO.
Se représenter et gérer différemment les territoires ; mettre en dialogue leurs acteurs
L’Atlas relationnel et son logiciel gratuit sont à disposition d’acteurs locaux pour dépasser les cloisonnements, se nourrir de l’expérience internationale, faciliter l’échange entre les acteurs publics et privés d’un territoire. Pour cela, on part d’une question partagée, par exemple le développement de systèmes agroalimentaires locaux. On invite chaque acteur à dire à quoi pour lui cette question est liée et on confronte ces différents regards. Puis on regarde les liens proposés par l’atlas relationnel. Ils sont certainement moins abondants que ceux qui ont été identifiés localement. En combinant les deux on peut tracer la "carte locale" des liens des systèmes agro-alimentaires locaux. Puis on se demande ce que l’on peut apprendre de l’expérience des autres territoires et pour cela on recherche les fiches d’expérience (y compris dans cet exemple la formation à distance) qui traitent des différents sujets liés à la question des systèmes agro-alimentaires locaux, de manière à nourrir la réflexion multi-acteurs au niveau local.
Citego n’a pas les ressources humaines pour faire l’accompagnement direct de ce type de dialogue entre acteurs mais est prêt à former techniquement les animateurs d’un territoire pour leur permettre de conduire ce type de dialogue
La formation permanente
CITEGO développe des dispositifs de formation dont des conférences en ligne ouvertes et massives (CLOM/MOOC) avec l’objectif de constituer des communautés apprenantes et développer des capacités d’apprentissage collectif permanent.
Le transfert au collectif des savoirs créés par les processus de capitalisation et des « relations » entre ces savoirs et d’autres travaux (relations rendues perceptibles sur le fonds documentaire par l’atlas relationnel) est une étape essentielle du cycle de médiation, dans une optique de création de communautés apprenantes.
Toutes les formations - MOOC ici