La diversité des aires urbaines

Eric Charmes, octobre 2015

La catégorie « aire urbaine » élaborée par l’INSEE recouvre une très grande diversité de situations. Il convient tout d’abord de distinguer les aires en fonction de leur métropolisation. Parmi les 354 aires urbaines françaises (telles que définies en 1999), l’INSEE propose de distinguer les aires métropolitaines et les grandes aires urbaines (Brutel, 2011). Les aires métropolitaines, caractérisées par une population d’au moins 500 000 habitants et 20 000 cadres ayant des fonctions dites « métropolitaines », sont au nombre de 12, avec notamment Paris, Lyon, Marseille, Lille, Nantes, Bordeaux, Toulouse, etc. Les grandes aires urbaines sont celles qui comptent au moins 200 000 habitants sans être des aires métropolitaines. Elles sont au nombre de 29 et comptent notamment Dijon, Tours, Valenciennes, Pau, Avignon, Brest, Le Havre…

Caractéristiques de quelques aires urbaines
E Charmes. D’après des données INSEE, recensement de 2008

Plus une aire urbaine est grande, plus sa population périurbaine est importante. En même temps, son poids démographique relatif décroît. Si, à l’échelle nationale, la population périurbaine représente près de 30 % de celle des grands pôles urbains, seulement 14 % des habitants de l’aire urbaine de Paris sont des périurbains (ce qui représente toutefois plus de 1,7 million de personnes). Et comme on peut s’y attendre, cette proportion tend à augmenter pour les petites agglomérations. Dans ces dernières en effet, la mobilité quotidienne est moins contrainte, et il est plus facile de s’installer dans un village périphérique tout en continuant à travailler au centre. Dans l’aire urbaine d’Auxerre par exemple, plus de la moitié de la population de l’aire urbaine est périurbaine et 70 communes sur 73 sont périurbaines. Dans les villes de ce type, ce n’est plus seulement la dynamique de croissance qui est dominée par la périurbanisation, c’est la ville qui est dominée par le périurbain.

Les aires urbaines se différencient également en fonction de leurs caractéristiques morphologiques. Marc Wiel propose de distinguer le degré d’éparpillement et l’intensité de la périurbanisation (Wiel, 2000). Cette intensité est notamment mesurée à partir de la proportion des emplois de l’agglomération centrale occupés par des personnes qui n’y habitent pas. Autrement dit, plus les emplois du pôle urbain sont occupés par des personnes qui n’y résident pas, plus la périurbanisation est considérée comme intense. Cette intensité diffère notablement d’une métropole à l’autre, différences qui semblent s’expliquer principalement par des contraintes géographiques (tels qu’un environnement montagneux ou la proximité d’un littoral) et par des traditions régionales (avec une production neuve en collectif plus présente dans l’Est ou le Sud-est que dans le Nord ou l’Ouest, terres d’élection de la maison individuelle).

L’éparpillement est quant à lui mesuré à partir du nombre de communes de l’aire urbaine, rapporté au nombre de ménages périurbains. Cet éparpillement peut là encore être limité par les contraintes géographiques. Il dépend également de la capacité de l’agglomération à retenir les ménages désireux d’accéder à la propriété d’une maison individuelle. Une telle capacité suppose une intercommunalité centrale incluant des communes périurbaines et disposant de réserves foncières suffisantes pour construire des maisons individuelles. Si tel est le cas, la périurbanisation tend à se concentrer sur un nombre limité de communes. Lorsqu’à l’inverse, les communautés centrales disposent de peu d’espaces constructibles pour les maisons individuelles (Marc Wiel cite les cas de Lille, Lyon, Rouen et Bordeaux), on observe un fort éparpillement. Hors des communautés centrales, un millier de périurbains supplémentaires peut à lui seul conduire à la « périurbanisation » de plusieurs communes rurales.

Les dynamiques de développement des aires urbaines sont également très variables. L’INSEE dans son analyse du zonage en aire urbaine de 2010, a classé les aires urbaines en fonction de leur rythme de croissance démographique (Floch et Lévy, 2011). Ceux-ci sont loin d’être partout les mêmes. Dans le Nord-est de la France, la croissance démographique tend à être plus faible qu’ailleurs alors qu’elle est plus élevée que la moyenne dans l’Ouest et dans le couloir rhodanien.

Références