État des lieux des actions existantes favorisant la mobilité transfrontalière pour la formation et l’emploi
La mobilité transfrontalière en lien avec la formation et l’emploi
août 2020
Conseil économique, social et environnemental régional (CESER)
La mobilité liée à la formation, loin d’être uniquement une mobilité des individus qu’il conviendrait de soutenir afin de renforcer le bassin d’emploi, est aussi un outil pour lutter contre les inégalités et les discriminations, et une source d’innovation pour faire face aux enjeux d’aujourd’hui et de demain tels que définis par le cadre politique de la Région Nouvelle Aquitaine. Elle peut prendre diverses formes telles que nous le montre cet état des lieux des pratiques de coopération des acteurs néo-aquitains.
À télécharger : 3_ceser_rapport_mobilite.pdf (360 Kio)
2.1 Une multitude de projets à diverses échelles territoriales
La mobilité n’est pas une fin en soi, elle est un m oyen. Dans ce sens, la mobilité transfrontalière doit être comprise comme un moyen de faciliter les échanges au sein d’un bassin de vie, dans lequel les citoyens doivent trop souvent contourner les « frontières administratives ». C’est ainsi que la coopération a été un levier puissant pour la mise en place de pratiques transfrontalières diverses et innovantes. L’analyse des dispositifs mis en place pour favoriser la mobilité transfrontalière en lien avec la formation et l’emploi en Nouvelle- Aquitaine (voir annexe), est révélatrice de plusieurs tendances :
2.1.1 Un dynamisme opérationnel qui se déploie sur plusieurs échelles d’intervention
Dans ces pratiques, il est possible d’observer des modèles qui articulent des approches transfrontalières et eurorégionales riches en apprentissages pour la Région dans son ensemble (échelle du territoire transfrontalier, échelle régionale, échelles départementale et locale, Communauté de travail des Pyrénées). Néanmoins, le caractère sectoriel de la coopération persiste et ce, au détriment d’une approche stratégique coordonnée1. La plupart des retombées directes et indirectes de ses activités bénéficient au territoire transfrontalier stricto sensu, mais elles peuvent également bénéficier à d’autres territoires de la Région.
2.1.2 Une conception large de la mobilité
Loin de se limiter à la mobilité transfrontalière des travailleurs, les différents projets mettent en œuvre un soutien à la mobilité transfrontalière sur la base de modalités diverses. Certains de ces projets présentent un caractère expérimental. D’autres sont des déclinaisons de politiques de développement sur lesquelles existe un consensus entre des acteurs des deux côtés de la frontière. Parmi les modalités de mise en œuvre, l’on observe :
-
la mobilité des travailleurs (mobilité individuelle ou échanges entre professionnels) ;
-
la mobilité des acteurs et publics de la formation (professeurs, encadrants, étudiants, stagiaires) ;
-
les échanges entre les institutions d’insertion professionnelle ;
-
les échanges des acteurs divers visant à la consolidation des conditions de formation par le biais de la coopération transfrontalière ;
-
la mobilité des apprenants et des stagiaires ;
-
les échanges des acteurs divers visant au développement d’une vision partagée et à une pratique concertée dans le cadre d’un domaine d’intervention donné (par le biais de la mise en œuvre des actions communes).
2.1.3 Une diversité de motivations
Pour les individus : un projet individuel d’emploi transfrontalier, l’acquisition de nouvelles compétences, l’amélioration de l’employabilité, l’épanouissement personnel. Pour les structures : l’amélioration de la mobilité transfrontalière en tant que telle ; la mobilité transfrontalière pour contribuer à atteindre d’autres objectifs ; l’amélioration d’une offre pédagogique, etc.
2.1.4 Une diversité des besoins
Les initiatives déployées dans les territoires font état du potentiel de la mobilité transfrontalière comme levier de la formation professionnelle et de l’emploi en lien avec une grande diversité de besoins rencontrés dans les territoires, parmi lesquels :
-
les besoins économiques, sociaux, culturels et artistiques ;
-
les besoins des entreprises en termes de compétitivité ou de mise en coopération et la construction de dynamiques solidaires (des entreprises de l’économie formelle et de l’économie sociale et solidaire respectivement) ;
-
les besoins d’un secteur économique spécifique (construction, agro-alimentaire, aquiculture, etc.) ou d’un secteur social spécifique (santé, handicap, aide aux personnes âgées, protection de l’enfance, etc.) ;
-
la lutte contre le réchauffement climatique ;
-
l’innovation ; - les besoins de connaissance (études, recherches) ;
-
la mise en place de politiques publiques transfrontalières.
2.2 Les systèmes de « gouvernance » : d’un millefeuille à l’autre
Si, comme notre état des lieux l’a montré, le bassin de vie transfrontalier a une réalité fonctionnelle, y compris en ce qui concerne la mobilité en lien avec la formation et l’emploi, le passage d’une logique de projets à une structuration plus ambitieuse de coopérations diversifiées exige une volonté politique partagée de part et d’autre de la frontière et un système de gouvernance cohérent2.
Or, la frontière de l’Eurorégion Nouvelle-Aquitaine – Euskadi – Navarre représente un véritable « millefeuille » de gouvernance, avec du côté néo-aquitain, huit structures de coopération intervenant sur le même territoire.
Ces structures sont :
-
l’Eurorégion Nouvelle-Aquitaine – Euskadi – Navarre ;
-
la coopération à l’échelle du massif (Communauté de travail des Pyrénées) ;
-
l’instance multi-niveaux (Conférence Atlantique-Transpyrénées) ;
-
l’accord bilatéral de coopération entre le Conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques et la Diputation de Gipuzkoa ;
-
deux structures locales (l’Eurocité basque et le Consorcio Bidasoa-Txingudi) ;
-
deux structures de coopération sectorielle (la CCI transfrontalière et la plateforme logistique Aquitaine-Euskadi).
Même si, pour la plupart, elles bénéficient d’un financement régional, elles ont très peu de contact entre elles. En effet, la variété d’entités travaillant sur cette thématique disposant chacune d’une organisation administrative et des politiques propres, ainsi que la superposition des dispositifs (appels à projets, projets européens, projets locaux, événements, etc.) entravent l’adoption d’une approche transversale de la mobilité transfrontalière en lien avec la formation et avec l’emploi et s’érigent comme un obstacle à la coordination de l’ensemble des parties prenantes 3.
A cette réalité, s’ajoute une dissymétrie dans la répartition des compétences, des réglementations, des calendriers politiques, etc. de part et d’autre de la frontière qui rend nécessaire la mise en place d’une structure de gouvernance associant à son action tous les acteurs institutionnels. Une telle gouvernance pourrait procéder à l’échange d’informations, la négociation de programmes d’action et la mise en cohérence de plans respectifs. Une structure comme le Groupement Européen de Coopération Territoriale (GECT) de l’Eurorégion Nouvelle-Aquitaine – Euskadi – Navarre pourrait apparaître comme un cadre adapté, sous réserve d’un élargissement de sa gouvernance qui lui permette de faire le lien entre les différentes structures de coopération4 .
Par ailleurs, une stratégie partagée n’est possible qu’à la condition de partir de la réalité des pratiques et des initiatives de coopération des acteurs de terrain et des institutions avec lesquelles ils construisent ces actions. C’est pourquoi, afin de consolider des réponses efficaces et cohérentes aux enjeux stratégiques du bassin de vie « eurorégional », il convient d’accompagner et soutenir les pratiques de coopération émanant des acteurs de la société civile et des acteurs privés, tout en renforçant la coopération entre les institutions situées dans les trois régions composant l’Eurorégion Nouvelle-Aquitaine – Euskadi – Navarre et les dispositifs pour se concerter et définir des solutions communes en fonction de leurs compétences respectives.
-
1 MOT, 2017, Les territoires transfrontaliers : La fabrique de l’Europe, in www.espaces-transfrontaliers.eu
-
2 MOT, 2017, Les territoires transfrontaliers : La fabrique de l’Europe, in www.espaces-transfrontaliers.eu (consulté en novembre 2019).
-
3 Audition de Fanny Cadet-Marthe, Chargée de mission Projets Mobilité du Conseil régional Nouvelle-Aquitaine. 11 septembre 2019.
-
4 Conseil de développement du Pays basque, 2019, Révélons le territoire transfrontalier. Projet de schéma de coopération transfrontalière.