Recife - Un plan climat ambitieux, intégrant les enjeux d’une vulnérabilité accrue et le rôle du secteur informel

Bilan de l’action climat des territoires

2018

Association Climate Chance (Climate Chance)

Depuis 2015, l’Association Climate Chance participe à la mobilisation dans la lutte contre le dérèglement climatique. Il s’agit de la seule association internationale se proposant de réunir à égalité l’ensemble des acteurs non-étatiques reconnus par l’ONU. Dans le but de renforcer leur action et crédibiliser les scénarios de stabilisation du climat, l’Association Climate Chance a lancé en 2018 un Observatoire mondial de l’action climat non-étatique, qui se donne comme objectif d’expliquer les évolutions des émissions de gaz à effet de serre, en croisant les politiques publiques nationales, avec les dynamiques sectorielles, les stratégies des acteurs privés, les politiques publiques locales, et les actions entreprises par les acteurs du territoire. Pour analyser la mise en cohérence des poli¬tiques publiques locales, Climat Chance propose un bilan des « mobilisations territoriales » à travers des exemples choisis de villes et de régions. Ici, le cas de Recife au Brésil.

Sélectionnée par l’ICLEI comme « ville modèle » de son projet Urban LEDS, Recife s’est dotée dès 2014 d’un plan climat intégrant atténuation et adaptation (PSMC), et visant une réduction des émissions de 21,18 % d’ici à 2037 par rapport à l’année 2012 (3,12 MtCO2eq). En 2012 les émissions étaient réparties comme suit : 65,2 % en transport, 19,4 % en traitement des déchets et assainissement, et 15,3 % en énergie stationnaire. Recife indique avoir émis 2,3 MtCO2eq en 2015, soit 20 % de moins qu’en 2012, en précisant que cette baisse est due à l’application d’une nouvelle méthodologie considérant le biocarburant comme neutre en carbone (CDP 2017). Avec l’aide d’Aria Technologie, la ville de Recife a mis en place en 2015 une carte interactive CARBO COUNT pour informer et sensibiliser les habitants sur l’évolution des émissions.

LE DÉVELOPPEMENT URBAIN FACTEUR DE VULNÉRABILITÉ

En 2007, le GIEC classait Recife parmi les villes les plus vulnérables au changement climatique au fait notamment de sa très forte densité de population en littoral et de son altitude moyenne en dessous du niveau de la mer. Majoritairement informel, le développement urbain de Recife amène à une distribution très inégale des activités, concentrées sur moins d’un tiers de son territoire. Il en résulte une disparition quasiment complète de la couverture végétale, une imperméabilisation croissante du sol urbain, et une concentration des problématiques transports et déchets. Pour y faire face, Recife mise sur une politique de plantation de 100 000 arbres dans la ville d’ici 2020 et sur l’agrandissement de son principal parc urbain « Capibaribe », lequel devrait engendrer une hausse de l’espace vert par habitant de 1,2 m2/hab à 20 m2/hab d’ici à 2037, et une réduction des émissions de 3,6 ktCO2eq/an à partir de 2020, soit environ 0,1 % des émissions.

L’URGENCE DE LA MOBILITÉ URBAINE

Avec une hausse de 382 % de la flotte de véhicules entre 1990 et 2014 (de 251 423 voitures à 1 211 218) et une offre en transports en commun qui n’a su suivre la hausse démographique, Recife est confrontée à des problématiques d’embouteillage et de transports publics défaillants de grande envergure. Pour y faire face, la préfecture travaille sur la finalisation de lignes de BRT Est-Ouest/Nord-Sud et l’implantation de couloirs BRs entre chaque quartier de la ville de sorte à favoriser l’accès et l’usage de transports en commun. Elle mise également sur la création de 76 km de pistes cyclables, la récupération de 110 km de trottoirs et l’amplification du programme de vélos en libre-service « Bike Pernambouc » (+700 % des abonnements au 1ersemestre 2018) pour stimuler l’usage de trans-ports doux. Enfin, Recife remplace actuellement l’ensemble de ses illuminations publiques et routières par des lampes LED, ce qui devrait réduire de 58% leurs émissions. L’ensemble de ces actions devrait représenter une diminution de 0, 2 MtCO2eq en 2020 et de 0,82 MtCO2eq d’ici à 2032.

LES ENJEUX DU TRAITEMENT DES DÉCHETS D’UNE VILLE SATURÉE

0,6 MtCO2eq proviennent d’un système de traitement des déchets majoritairement déficient, où 99,6 % des déchets de la métropole sont enterrés en décharge privées sans aucun tri, recyclage ni récupération de biogaz, engendrant une pollution accrue des fleuves et canaux de la métropole. Actuellement Recife travaille sur la construction de 8 nouveaux écopoints et la création de centres d’achat et vente des déchets solides, de sorte à stimuler les réflexes du tri sélectif au sein des populations. Elle a également mis en place une politique de valorisation du travail des collecteurs de déchets avec des vélos de tri dans les quartiers défavorisés “bicicletas”, représentant jusqu’à 40 % de la récolte dans certains quartiers. Ces politiques visent une réduction de 25 % des émissions liées au traitement des déchets d’ici à 2032.

Références

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