Grigny dans le Rhône, un laboratoire de la démocratie participative

Félix BEAUVAIS, février 2012

Dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale (DPH)

Ce retour d’expérience présente la mise en place et l’évolution de la démarche participative de la ville de Grigny. Dès les années 1970, la ville a développé de nombreuses instances participatives, des conseils de quartier à la systématisation du budget participatif.

Introduction

La démarche participative de la ville de Grigny, dans le département du Rhône, est une démarche ancienne. Elle remonte à 1977 et à l’élection du premier maire communiste de la commune. Ce basculement politique traduit localement la transformation et le renouveau du personnel politique municipal occasionné par la large victoire de la gauche lors des élections municipales de 1977. Depuis, tous les maires élus à Grigny ont été communistes ou apparentés, ce qui a assuré une forme de continuité politique dans le temps long et a abouti aujourd’hui à un consensus au sein de la majorité municipale. Les élus de la majorité municipale qui y étaient hostiles se sont retirés et ils ont été remplacés par des participants intéressés par la démarche élective. Ce processus d’adhésion des élus locaux à la démarche s’est combiné à une mutation progressive des services municipaux. Ces derniers se sont enrichis d’un service dédié à la démocratie participative, qui s’est très largement adapté aux attentes placés en lui, et les agents ont au fur et à mesure été intégrés à la démarche pour en constituer aujourd’hui un rouage essentiel. Ainsi, le recrutement d’agents municipaux a été conditionné par cet impératif participatif.

On constate depuis le lancement en 2004 du premier groupe de travail « budget participatif » une accélération de la démarche, notamment depuis les élections municipales de 2008 et l’audit interne commandé par la mairie. Ainsi, depuis trois ans, la dynamique semble renforcée et élargie : de très nombreuses instances se sont mises en place afin de répondre au plus grand nombre possible de questions. Les thèmes abordés, les publics visés, les objectifs affichés et les échelles d’intervention sont très variés et permettent un développement progressif de la démarche.

Les instances participatives aujourd’hui

Le quartier, échelle historique de la participation

Historiquement, les premières instances misent en place furent les conseils de quartier (CQ). Au nombre de quatre depuis 2010, ils couvrent la totalité du périmètre de la ville. Ils sont ouverts à tous les Grignerots sans aucune forme d’inscription ni d’élection. Chaque réunion rassemble une quarantaine de participants en moyenne, mais de nombreuses familles sont liées à l’actualité de leur conseil via le site internet et la correspondance courrier. En tout, la mairie a enregistré 180 contacts mail et 130 contacts courrier. Ces conseils font vivre la démarche au jour le jour et permettent aux habitants de faire part de leurs remarques ou de leurs demandes à la mairie. Lors de ces CQ, la parole est réservée aux habitants, les élus référents du quartier sont présents pour conduire les débats, expliquer les choix municipaux et enregistrer les demandes, mais se font les plus discrets possibles. Les services municipaux sont aussi présents : le service Démocratie participative est toujours représenté. Il a pour mission de rédiger le compte rendu de la réunion et de faire le lien avec les autres services en cas de demande spécifique. Au besoin, les autres services, notamment les services techniques, le service urbanisme ou le service financier, sont conviés à ces CQ pour apporter un éclairage technique sur une question précise.

En plus de ces CQ, le service Démocratie participative organise des visites de quartier qui permettent aux élus et aux techniciens de collecter les observations et les demandes des habitants in situ. Enfin, des fêtes de quartier ou des soirées conviviales sont organisées conjointement par les habitants et le service Démocratie participative. Ces événements, par leur côté moins formel, espèrent mobiliser les populations qui ne participent pas habituellement aux autres temps participatifs.

Des instances participatives adaptées au public visé

Afin d’intéresser les citoyens à tous les aspects de la vie municipale, la ville de Grigny s’est dotée de nombreuses instances participatives thématiques. Ces groupes de travail sont des espaces de réflexion, de concertation et de décision, ils sont une réponse à l’exigence des habitants d’être associés, à la fois aux techniciens et aux élus municipaux afin d’aller plus loin dans la co-construction de la ville. On notera donc :

Grigny a aussi mis en place des instances dédiées à certains publics. Les associations étant très demandeuses d’infrastructures et souvent en contact avec les services municipaux, la ville a décidé de mettre un place le conseil associatif. Ce dernier est ouvert aux 70 associations de la commune qui contribuent au développement du lien social sur le territoire communal. Ce conseil permet de débattre et d’élaborer les projets éducatifs, sportifs, culturels ou sociaux mis en œuvre par les associations. Afin de mobiliser les jeunes, qui sont souvent absents des autres instances participatives, la ville a mis en place un conseil local des jeunes, qui peine cependant à fonctionner de façon satisfaisante. Enfin, la ville de Grigny a mis en place un conseil de ville : c’est l’assemblée générale de toutes les instances participatives. Ce groupe permet de mettre en œuvre la question de la transversalité et de l’intérêt général.

Le groupe Budget Participatif et Fiscalité Locale (BP)

Conçu à partir des exemples sud-américains, le groupe BP est en quelque sorte l’aboutissement de la démarche participative de la ville de Grigny. Le processus pour l’année 2011 est le suivant : dans un premier temps, le groupe BP recueille des propositions par divers canaux : questionnaire papier, internet, journal de la ville, et instances participatives. Ces dernières sont mises en débat au sein des instances participatives thématiques compétentes.

Puis, les propositions ainsi retenues, précisées et portées par des instances participatives, sont transmises aux services municipaux, qui les analysent, en discutent la faisabilité, notamment réglementaire, et en estiment le coût. Ensuite le groupe BP émet un avis de priorité sur l’ensemble des propositions en prenant en compte l’analyse technique, réglementaire et financière des services, les critères d’intérêt général, la connaissance des services existants et leur vision sur les finances locales. Enfin, début décembre, l’assemblée de mise aux voix vote le budget participatif sur la base du groupe de travail BP. Cette assemblée est ouverte à tous les grignerots, sans inscription ou élection préalable.

Pérenne depuis 2006, ce dispositif est en constante évolution grâce à la soirée « retour sur expérience ». En 2011, le budget participatif représente près de 25% du budget global d’investissement de la commune de Grigny. L’ambition des élus et du groupe BP est de remettre entre les mains des Grignerots le budget d’investissement dans son intégralité.

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