Le Fonds de péréquation de la cité métropolitaine de Bologne
Carnet pratique n°16 : (Re) développer les activités productives dans les régions métropolitaines
Thierry Petit, novembre 2024
Le Plan stratégique métropolitain de Bologne affirme les valeurs « hospitalité, diversité, droits fondamentaux, équité… » et quelques orientations, notamment environnementales, pour imaginer le développement territorial. Avec le fonds de péréquation, les élus fondent leur action sur un partage de conscience, une mobilisation collective autour d’un système d’action commun et de nouvelles formes de redistribution pour proposer une approche plus souple et plus ouverte de l’aménagement.
À télécharger : bologne_rapport-espaces-eco-ville-3_198_245.pdf (6,1 Mio), cp16_ok_bat_web.pdf (7,3 Mio)
La cité métropolitaine de Bologne s’étend sur 3 700 kilomètres carrés et compte environ un million d’habitants. Depuis la loi nationale de 2014, relative à l’organisation territoriale italienne, qui comprend désormais un niveau communal, métropolitain et régional, dix métropoles ont été créées. À cette occasion, la cité métropolitaine de Bologne s’est substituée à la province de Bologne, en conservant le même périmètre.
La Région Émilie-Romagne, qui dispose d’un pouvoir législatif, a instauré en 2017 pour la cité métropolitaine de Bologne l’obligation de mettre en place un plan métropolitain territorial. Les premiers travaux ont débuté en 2019 et le Plan métropolitain territorial a été adopté en 2020. Il comporte le principe de la création d’un fonds de péréquation métropolitain. Celui-ci est destiné à financer des projets de régénération urbaine au sein des communes les plus pauvres, les moins attractives et les moins développées de la métropole.
La métropole de Bologne, avec 55 communes rassemblées au sein de sept fédérations de communes, comporte de fortes disparités territoriales. Parmi les plus aisées, et les plus attractives pour les investisseurs, onze communes seulement présentent un indicateur de fragilité bas. Ce fonds vise aussi à aider les municipalités « hors marché » à bénéficier d’opérations de renouvellement urbain, en facilitant l’accès à des financements complémentaires (y compris privés) pour des projets uniquement publics. Le renouvellement urbain passe ainsi de l’échelle urbaine à l’échelle métropolitaine. Cela se traduit par une limite d’extension urbaine jusqu’à 3 % des surfaces déjà urbanisées à l’horizon 2050 selon l’application de la loi urbaine régionale de 2017 : seul 1 % reste à l’échelle communale, les autres 2 % sont transférés à l’échelle de la métropole. Appliquer ce critère permet ainsi de moduler ce taux suivant les communes.
Ce fonds, créé en 2021, est une première en Italie, et sans doute en Europe. Il a vocation à être financièrement autonome et indépendant. À ce titre, ses revenus proviennent pour moitié des charges d’urbanisation secondaire oneri di urbanizzazione tirées des opérations de développement urbain, menées dans le cadre de l’enveloppe des 3 %. Financé essentiellement par les communes les plus riches, la difficulté a été de leur faire accepter de partager les ressources qu’elles tirent du renouvellement urbain qui s’opère spontanément sur leur territoire. Cette opposition a été surmontée en mettant en avant les services « écosystémiques » rendus par les communes les plus à l’écart du développement de la métropole et les moins attractives.
Par ailleurs, la limite d’extension, qui passe à l’échelle de la métropole et non plus à celui de la commune, bénéficie aussi aux communes les plus attractives puisqu’elles peuvent ainsi dépasser le calcul de l’enveloppe restreint à leur seul territoire. La Ville de Bologne, avec un fort taux de fragilité économique, était elle-même favorable à la mise en place d’un fonds de péréquation, ce qui a facilité sa mise en place. En outre, son maire assume aussi la présidence de la cité métropolitaine. Pour sa première année d’abondement, il a disposé d’un budget de 2,3 millions d’euros.
À terme, ce fonds sera géré par la cité métropolitaine, les sommes déposées seront à disposition du programme métropolitain de régénération sans limite de temps. Les opérations de renouvellement bénéficiaires de ce fonds sont sélectionnées par appel à projets annuel, avec comme principal critère de sélection la vulnérabilité économique ou sociale du territoire concerné (commune et groupement de communes), qui compte pour la moitié de la note du projet avec un bonus supplémentaire s’il s’agit d’un groupement de communes. Les critères portent aussi sur l’intérêt métropolitain du projet. Un des objectifs du fonds est de multiplier les actions de renouvellement sur ces territoires avec la mise en place d’un portefeuille de projets, qui sera soumis année après année aux appels à projets. Pour ce faire, des groupes de travail locaux, nommés Officine di Rigenerazione Metropolitana (ORMe), ont été constitués avec le personnel technique de la cité métropolitaine et des communes, pour identifier les sites et proposer des actions à y mener.
Le fonds comprend le financement des études en amont jusqu’aux travaux de réalisation des opérations de renouvellement. Les thématiques concernent les domaines liés à la biodiversité et aux écosystèmes, à l’agriculture, au tourisme, aux énergies renouvelables, à la résorption des friches industrielles, au renouvellement des sites d’activités, y compris ceux en difficulté, comme pour les zones alpines. Ainsi, des études de projet d’EnR ont été lancées en 2022 (dont le premier AAP en juin 2023), grâce au fonds de péréquation pour un montant de 700 000 euros.
Facteur de réussite/points de vigilance
Une ville centre moteur pour la mise en place de ce fonds malgré la réticence de quelques communes les plus riches. Une longue tradition de coopération intercommunale, qui remonte à 1995 alors que la métropole était encore une province et qui a facilité le processus de concertation et la prise en compte des enjeux métropolitains. La cité métropolitaine s’est ensuite vu confier la compétence d’aménagement par la Région. Un fort leadership de la Métropole, qui a su susciter l’adhésion des autres municipalités et groupements. Une solide ingénierie capable de mettre en place ce fonds et d’en assurer sa gestion.