Où en est-on fin 2013 dans la lutte contre le changement climatique ?
2013
Cette fiche propose un bilan de l’année 2013, à la fois sur les évolutions du second semestre (nationales, européennes et internationales) et sur les tendances quantitatives par rapport aux différents objectifs en matière de lutte contre le changement climatique.
I. Politique française
1. Mesures fiscales dans le Projet de loi de finances 2014
Un rapport du Comité pour la fiscalité écologique a été remis aux ministres de l’économie, du budget et de l’écologie le 18 juillet 2013.
2. Taxe poids lourds : mise en service prévue octobre 2013
Suite à un fort mouvement de contestation né en Bretagne (région sensible car la plupart des autoroutes sont gratuites donc dans le champ de la taxe), le premier ministre a annoncé le 29 septembre la suspension de l’écotaxe poids-lourds. E parallèle, un débat juridico-économique a été engagé sur le contrat passé avec la société Ecomouv pour la mise en œuvre de l’écotaxe, contrat qui serait très lourd à dédommager si la taxe était abandonnée.
3. Le projet de loi sur la transition énergétique
Le débat national ouvert en mars a été clos en juillet par la remise d’une synthèse par le comité de pilotage du débat. Des annonces étaient attendues le 18 septembre lors de l’ouverture de la deuxième Conférence environnementale du quinquennat Hollande.
Le débat au parlement est prévu au printemps 2014.
II. Politique européenne
1. Politique énergie climat à l’horizon 2030
La Commission européenne a ouvert le 27 mars 2013 la consultation sur la politique énergie climat à l’horizon 2030. L’objectif général est de fixer des objectifs au-delà de ceux existant pour 2020 et de préparer les négociations internationales supposées aboutir à des engagements chiffrés pour tous les pays lors de la conférence qui doit se tenir à Paris en 2015. Les sujets ouverts sont les suivants :
-
quels objectifs quantitatifs pour 2030 ?
-
quels instruments avec quelle cohérence entre l’Europe et les Etats membres ?
-
la compétitivité de l’UE (dans le monde, dépendance et facture énergétique)
-
comment tenir compte des capacités respectives des Etats membres ?
Le Livre vert qui sert de base à cette consultation rappelle le chemin parcouru depuis l’adoption du paquet énergie-climat en 2008 et ses objectifs pour 2020 :
-
Gaz à effet de serre (objectif – 20 % d’émissions par rapport à 1990) : -16 % atteint en 2011
-
Energie renouvelables (objectif 20%) : 12,7 % en 2011 pour 8,5 % en 2005), pour ce qui est des transports 4,7 % en 2011 pour 1,2 % en 2005
-
Economies d’énergie : avancement globalement non satisfaisant mais à noter l’évolution positive pour les voitures neuves : 172 g CO2 par km en 2000 ; 135,7 en 2011.
En complément de cet état d’avancement, le Livre vert souligne que la feuille de route 2050 adoptée en 2011 avec l’objectif de limiter l’élévation de température à 2°C par une baisse de 80 à 95% des émissions de GES par rapport à 1990, suppose d’atteindre en 2030 – 40 % d’émissions et 30 % d’énergies renouvelables et que le Livre blanc des transports adopté également en 2011 fixe l’objectif sectoriel de 10 % d’énergies renouvelables et d’une baisse de 6 % du contenu carbone des carburants. La commission souligne également le problème du prix du carbone : 5 à 7 euros la tonne (voir encadré plus haut) alors que le prix significatif pour le développement de technologies propres serait de 20 €.
La consultation des parties prenantes était ouverte jusqu’au 2 juillet 2013, les premières propositions de la Commission sont attendues pour fin 2013 et les décisions pour 2014 ou 2015.
2. Réglementation des émissions de CO2 des véhicules
Au moment où ce dossier se clôt, les décisions de la Commission européenne sur la réglementation CO2 ne sont toujours pas définitives en raison d’une intense pression de certains constructeurs, allemands notamment, pour repousser l’échéance des 95 g par km prévue en 2020. Ils tentent d’obtenir que cet objectif soit étalé en fixant une exigence de 80% des véhicules neufs à ce niveau en 2020, croissant annuellement pour atteindre 100% en 2024.
III. Contexte international
1. Premières indications sur le rapport du GIEC 2014
2. La Conférence des parties en novembre 2013 à Varsovie
L’enjeu de cette conférence était d’engager un processus permettant d’arriver à Paris en 2015 à un accord engageant tous les pays de la Convention cadre sur des objectifs applicables à partir de 2020. Le résultat à cet égard apparaît bien timide. Les pays en développement sont avant tout soucieux de voir de dégager des financements pour pallier les évènements climatiques extrêmes qui commencent à se multiplier et renvoient, pour ce qui est de la limitation des émissions, les pays développés à leurs responsabilités. Et rien de concret n’a été obtenu pour esquisser une trajectoire de réduction des émissions compatible avec l’objectif de limiter le réchauffement à 2°C d’ici la fin du siècle.
Le prochain rendez-vous est à Lima en 2014 et les participants de Varsovie se sont accordés sur la nécessité qu’un projet d’accord 2015 soit élaboré six mois avant la Conférence de Paris.
IV. Quelques indicateurs sur le chemin parcouru et les tendances
1. Energie et effet de serre
Les émissions mondiales de CO2 (Agence internationale de l’énergie, Key World Energy Statistics 2013)
-
Total Monde : en 1973 15 628 millions de tonnes (Mt), en 2011 31 342 Mt
-
Dont Chine : en 1973 5,8 %, en 2011 25,5 %
-
OCDE : en 1973 66,1 %, en 2011 39,4 %
Quelques repères sur les émissions par habitant
-
France : 320,8 Mt pour 65,12 millions d’habitants soit 5 tonnes par habitant
-
Allemagne : 747,58 Mt pour 81,78 Mh soit 9,14 tonnes par habitant
-
Etats-Unis : 5 287,18 Mt pour 312,04 Mh soit 16,94 tonnes par habitant
-
Chine : 7 954,55 Mt pour 1 344,13 Mh soit 5,69 tonnes par habitant
-
République Démocratique du Congo : 3,27 Mt pour 67,76 Mh soit 0,048 tonnes par habitant.
Où l’on voit que la Chine, pourtant en plein développement, est au-delà de la consommation française et où l’on comprend les tensions entre pays en développement et pays développés (RDC 100 fois moins que la France).
2. Europe et France
Les émissions de GES de l’Union européenne à 27 ont diminué de 18 % entre 1990 et 2011. Elles sont dues pour 33 % à la production d’énergie, pour 20 % aux transports. Pour la France, la baisse est de 13 % mais le transport arrive en tête avec 27 %. L’Europe, comme la France, est donc en avance sur les objectifs du protocole de Kyoto : baisse de 8 % pour l’Europe, stabilité pour la France. Les mécanismes du protocole de Kyoto ont permis d’éviter plus de 2 milliards de tonnes d’équivalent CO2 ; le système de quotas d’émissions couvrait en 2012 plus de la moitié des émissions de CO2 de l’Union à 27.
Mais il faut noter que l’approche « empreinte carbone » (on ajoute les émissions des produits importés et on retranche celles des produits exportés) est moins favorable du fait de la tertiarisation de l’économie. Ainsi, les émissions par habitant de la France étaient de 12,2 t en 2007 contre 8,2 en approche territoire (les seules émissions sur le territoire), pour une moyenne mondiale de 4,3 tonnes dans les deux approches. En somme, la France « importe une part croissante d’émissions de CO2 » (Medde, chiffres clés du climat, France et Monde, édition 2014).
3. Transports terrestres
Le contexte économique (Insee première, mai 2013 ; les comptes de la Nation 2012).
Le pouvoir d’achat des ménages se replie fortement (-0,9 % après +0,7 % en 2011) et les ménages réduisent leur consommation (-0,9 % en euros constants), une première depuis 1993. Les achats d’automobile baissent nettement (-7 % après +0,6 % en 2011), les dépenses de services de transport ralentissent (+0,4 % après +2,6 %).
Résultats pour les transports (Medde/CGDD, références, avril 2013 : les comptes transports de 2012, premiers résultats).
On observe une baisse du transport de marchandises et une résistance du transport de voyageurs. La production marchande de services de transport diminue et le secteur des transports perd 5 000 emplois salariés. La voiture particulière, qui garde sa place prédominante dans les modes de déplacement (82,7 % du transport de voyageurs) est stable au niveau de 2011, soutenue par la progression du parc de véhicules. La circulation recule sur le réseau national (y compris autoroutes) et progresse sur les réseaux secondaires et urbains. La circulation des véhicules particuliers reste quasiment stable et celle des poids lourds se contracte fortement. Du fait de la diésélisation du parc qui se poursuit, de l’amélioration des performances des véhicules, les consommations unitaires des véhicules particuliers diminuent. L’année 2012 est marquée par un recul quasi historique des immatriculations de véhicules neufs.
Emissions de CO2 des voitures neuves (Ademe, Car labelling 2013)
Pour les véhicules particuliers vendus en 2012, la France est en troisième position en Europe avec 124 g de CO2 par km, derrière le Danemark (117 g) et le Portugal (119 g). L’objectif européen de 130g en 2015 est atteint depuis 2010. En 2012, les véhicules émettant moins de 140 g ont représenté 85 % des ventes. Sur quelques 1,9 millions de véhicules vendus, le diésel représente 72,9 % des ventes (33 % en 1990), l’essence 28,3 %, les motorisations modulables superéthanol-E85 3,8 %, les hybrides 1,4 % et les véhicules tout électrique 0,3 % (deux fois plus en nombre qu’en 2011). Ces résultats français sont largement dus au bonus-malus et la marge de progression reste significative par le poids des véhicules qui a encore augmenté de 5 kg en 2012 pour le diésel et de 6 kg pour l’essence (poids moyen 1 260 g contre 953 en 1990).