Rénovation urbaine douce dans les zones de réhabilitation à Berlin — Prenzlauer Berg

Birgit WEND, 1999

Cette fiche présente un cas étranger de rénovation urbaine : la rénovation du quartier Prenzlauer Berg, à Berlin, à la fin des 1990. Cette fiche est intéressante en ce qu’elle expose les problèmes rencontrés dans le cadre de la rénovation urbaine, dans un pays souvent cité en exemple, en ce qui concerne l’accès au logement.

La participation des habitants est un élément essentiel du processus de réhabilitation. Elle produit un effet double : dans de nombreux cas, il est possible de prendre des décisions en vue d’améliorer la situation sociale dans le quartier (réalisation de projets sociaux, obtention et annulation d’un projet de rénovation d’un immeuble, suivant la situation).

Même si les actions menées par les habitants ne sont pas toujours couronnées de succès, elles leurs permettent de manifester leur intérêt pour leur quartier et cela ne peut être omis par les responsables politiques. Ces initiatives ont besoin du soutien des divers intervenants, comme par exemple la société d’aménagement STERN GmbH ou la société de conseil aux locataires. Mais il est aussi évident que les problèmes sociaux dus à une aggravation du chômage et au manque de place en apprentissage dans le quartier, ne peuvent être résolus par une réhabilitation, même sous le modèle de la participation.

Contexte politique, économique et institutionnel

Nous sommes en Allemagne, à Berlin, plus précisément dans le quartier de Prenzlauer Berg. La conservation de la trame du bâti et la prise en compte des besoins des habitants concernés sont, ici, deux principes de la rénovation urbaine à Berlin, adoptés par le Sénat le 31 mai 1995. Le Sénat et la mairie de Prenzlauer Berg ont chargé la société d’aménagement STERN de la réhabilitation de Prenzlauer Berg. Pour ce qui est de la participation des habitants au processus de réhabilitation, la base est formelle : le paragraphe 137 du BauGB déclare comme personnes concernées : les locataires, les usagers, les propriétaires, les employés et les industriels. Les conditions de participation sont définies par les instructions du Sénat dans le droit urbain spécial, datant du 6 mai 1995. Ces instructions règlent aussi le droit à l’information précoce, le conseil et la participation des habitants au niveau de la préparation et de la réalisation du processus de réhabilitation.

Dans les quartiers de réhabilitation, la loi prévoit de mettre un local à la disposition des représentants des citoyens et de mettre en place un comité consultatif à la réhabilitation.

Le travail de rénovation des quartiers historiques du XIXe siècle de la ville fait partie du processus de développement urbain de Berlin en vue de sa réunification et de sa transformation en capitale d’une Allemagne réunifiée. À cause des charges financières considérables de la ville, la rénovation urbaine comme devoir public se voit malheureusement rejetée à l’arrière-plan. Le gouvernement de Berlin compte, ici, surtout sur les investissements privés. En même temps, se développe une polarisation sociale croissante dans les quartiers du centre-ville, ce qui renforce la menace d’expulsion des ménages à bas revenus.

Description du processus

Date de l’expérience

L’expérience décrite se base sur l’étude préparatoire réalisée par STERN de 1990 à 1993 et depuis 1993, année de la déclaration publique des quartiers de réhabilitation. Leur durée est estimée entre 15 et 20 ans.

Nombre de personnes concernées

Dans les 5 quartiers de réhabilitation, vivent environ 49 000 habitants. Si l’on ajoute les habitants des quartiers voisins qui profitent d’une protection spéciale (selon le paragraphe 172 du BauGB) ce sont 74 000 personnes. À peu près 100 personnes se sont organisées dans des groupes de représentants.

Les motifs de l’organisation des habitants

La disposition des habitants à s’engager dans les quartiers concernés n’est pas récente. Dans les années 1980, le régime de la République Démocratique d’Allemagne (RDA) avait l’intention de démolir des parties entières de la ville du XIXe siècle, la plupart des logements de cette époque n’étant pas équipés de salle de bain et les toilettes se trouvant sur le palier. Le chauffage était encore au charbon et les immeubles n’étaient pas entretenus depuis plusieurs dizaines d’années. De plus, l’habitat de cette époque était pour la RDA le symbole d’une façon de vivre bourgeoise et décadente. La protestation des habitants a été vive contre la démolition prévue et la menace de relogement vers les quartiers monotones et excentrés de logements préfabriqués. Ils présentèrent des solutions alternatives et arrivèrent à repousser la démolition.

En 1989, le mur de Berlin tombe. Dans ce contexte de changements politiques, la motivation pour s’engager pour son quartier s’accrut au-delà des représentants élus des citoyens concernés par la réhabilitation. Diverses organisations comme des associations ou initiatives de locataires (par exemple l’initiative WbA «Wir bleiben alle » « nous restons tous ») se forment, afin de se défendre contre la menace d’expulsion, d’améliorer l’environnement urbain et de créer des projets d’amélioration de l’infrastructure sociale.

L’organisation des habitants, sous différentes formes, est motivée par leurs intérêts à influencer le processus de réhabilitation, mais aussi par les contradictions inévitables entre les principes fixés pour la réhabilitation et la réalité des faits :

Les départs n’ont pas toujours des causes objectives, les habitants vivent la situation tous différemment et partent parfois pour des raisons qui leur sont propres.

Exigences des habitants

Les représentants des habitants et le comité consultatif de réhabilitation, où ils sont représentés, demandent l’application stricte des instruments légaux, pour protéger les habitants du quartier de l’expulsion, en particulier les familles en situation difficile :

Stratégies employées par les habitants

Chances des habitants pour changer la politique de rénovation

La politique de rénovation du Sénat de Berlin essaye de faire un équilibre entre les intérêts des investisseurs privés, nécessaires au financement de la rénovation urbaine dans les quartiers historiques du centre-ville, et les buts de type sociaux, qu’il s’est donné, visant à la protection des locataires. Très souvent, les intérêts privés sont, malgré tout, vainqueurs. Etant donné que la ville de Berlin s’en est accommodée, il faudra attendre un changement politique pour renverser la situation. Dans le cas actuel, seule une coopération active entre les différents intervenants (locataires, comité consultatif, société d’aménagement STERN GmbH, société de conseil aux locataires et la mairie de quartier) peut rééquilibrer la situation, en s’occupant de cas bien précis, et prendre en considération avec succès les besoins des groupes en difficulté. Les organisations des habitants sont une partie intégrante de cette stratégie prudente.

Participation des habitants à la planification urbaine

Elle est le principe fondamental de la rénovation urbaine douce. En dehors des représentants de la population touchée par la rénovation, il y a le comité consultatif, qui rend possible la discussion pour dénouer les conflits, issus du processus de la rénovation, entre les représentants des habitants, l’administration et les représentants politiques. N’y sont prononcées que des recommandations pour les décisions qui sont à prendre.

Alternatives proposées à la population concernée

La loi, qui règle les secteurs de rénovation, impose au propriétaire de proposer au locataire un éventail de logements de substitution dans le quartier d’origine, et sous les mêmes conditions (hauteur du loyer, nombre de pièces, etc.). Au libre choix du locataire de rester dans ce nouveau logement ou de réintégrer l’ancien une fois les travaux terminés. Lorsque le propriétaire a choisi d’être subventionné par le Sénat, pour la rénovation de son immeuble, la mairie de Prenzlauer Berg se charge de mettre des logements à disposition, ainsi que de verser les indemnités de déménagement. Dans le cadre de financements privés, c’est à la charge du propriétaire et c’est souvent dans ce cas de figure que de graves problèmes peuvent apparaître. Si le locataire ne s’engage pas à faire respecter ses droits, il lui faudra se résigner à déménager. Pour les couches sociales moyennes et élevées, le marché du logement est étendu et le nombre de déménagement pour aller vers d’autres quartiers, a considérablement augmenté ces derniers temps. Pour les familles à bas revenus, ne reste que la possibilité de déménager dans un quartier où la rénovation n’a pas encore eu lieu, on appelle ces familles, les « nomades de la rénovation urbaine ». Il est à noter, que la loi, pour certains cas précis et difficiles (comme une personne très âgée aux revenus bas), donne la possibilité au locataire de refuser la modernisation de son appartement.

Acteurs engagés dans le processus et leur rôle

Réactions des différents secteurs

Les quartiers de réhabilitation de Prenzlauer Berg font partie de la ceinture d’habitations urbaines denses, datant de la fin du XIXe siècle, autour de l’ancienne cité de Berlin.

Au niveau national

La plupart des quartiers sont situés là où le programme URBAN est en vigueur.

Plusieurs projets, deux terrains de jeu, un espace vert près d’une maison pour les jeunes, une maison pour enfants sur un terrain d’aventure ont pu être financés par le programme. Ces investissements sont accompagnés d’un programme d’embauche. Ces projets n’auraient pas pu être financés par le budget de la mairie, ils sont une contribution importante pour la stabilisation sociale du quartier.

To go further

Le site de STERN. STERN est une société d’aménagement privée, en charge de la réhabilitation de plusieurs quartiers à Berlin, et qui prône la participation des habitants au processus de rénovation.

Le projet Prenzlauer Berg