« La nature dans les quartiers prioritaires », de quoi parle t-on ?

January 2024

Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT)

Publié par l’ANCT, à l’origine du projet, Le rapport 2024 de la Fabrique Prospective « la nature dans les quartiers prioritaires » apporte un éclairage nouveau sur les rapports Nature et QPV : définitions et intérêt de la valorisation.

To download : fp_qpv_nature_complet_29_janvier_0.pdf (11 MiB)

La Nature : Éléments De Définition

Le biologiste Gilles Bœuf explique que la nature désigne l’ensemble des systèmes existants, constitué en même temps que la Terre (océans, roches, volcans, sédiments, vents) alors que la biodiversité est la fraction vivante de la nature qui commence lorsque les premières cellules apparaissent. Aujourd’hui, un peu plus de deux millions d’espèces (virus, bactéries, champignons, plantes, animaux) constituent la biodiversité. Ces espèces se combinent entre elles pour fabriquer les écosystèmes (forestier, agricole, marin, littoral, rocheux, etc.) c’est-à-dire des systèmes chacun formé par un environnement (biotope) et par l’ensemble des espèces (biocénose) qui y vivent, s’y nourrissent et s’y reproduisent. Les avantages socio-économiques retirés par l’homme de son utilisation durable des fonctions écologiques des écosystèmes sont qualifiés de services écosystémiques. L’Agence européenne de l’environnement distingue trois types de services écosystémiques :

Ces services écosystémiques montrent que dans tout territoire, la nature est source d’apports matériels et immatériels tels que :

Le concept de service écosysémique permet donc de saisir la dépendance de la société à la nature. Une surexploitation du service, la destruction de l’écosystème ou la dégradation des fonctions écologiques conduisent à sa réduction, voire à sa disparition. L’enjeu réside donc dans la préservation de ces écosystèmes, la restauration de leurs fonctions et la lutte contre leurs dégradations (artificialisation, pollutions, etc.).

Nature Et Qpv : Un Sujet Méconnu

A partir des années 2000, des études et des recherches ont commencé à porter sur le développement durable des QPV et plus récemment sur leur transition écologique. Ces travaux restent néanmoins peu nombreux et sont souvent localisés (à l’échelle d’un QPV ou d’une agglomération) et sectoriels (rénovation énergétique, déchets, etc.). Ce constat est encore plus marqué concernant le sujet de la nature dans les QPV.

En effet, d’une part, il n’existe pas de données statistiques relatives à la nature à l’échelle des QPV (inventaire des espèces, qualité des milieux, etc.), d’autre part les études circonscrivent souvent le sujet à l’agriculture urbaine (jardins partagés, jardins familiaux, etc.). Néanmoins, plusieurs travaux tendent à montrer que les lieux de vie des personnes les plus pauvres sont les moins bien dotés en termes de biodiversité :

Diane Hope, docteur en biogéochimie et Ann Kinzig, professeur à l’université d’Etat d’Arizona, ont montré en 2003 et 2005 que la diversité des plantes et des oiseaux est corrélée positivement au revenu des résidents. Ainsi, à Phoenix, en Arizona, les parcs des quartiers riches comptent vingt-huit espèces d’oiseaux, et ceux des quartiers pauvres dix de moins. Un « effet de luxe » lierait la profusion des ressources humaines et la diversité spécifique dans les écosystèmes urbains.

Par exemple, le schéma directeur de la région Île-de-France prévoit l’accès à 10 m² d’espaces de nature par habitant, en ciblant leur développement en priorité dans les municipalités comportant moins de 10 % d’espaces naturels, quelles que soient les caractéristiques socio- économiques de leurs habitants. […] Ce choix peut être discutable d’un point de vue de la justice sociale en Île-de-France, car bien que la ville de Paris soit assez dépourvue d’espaces de nature, ses habitants sont parmi les plus favorisés en termes de revenus moyens ou d’éducation comparativement au reste de l’Île-de-France, ce qui leur permet notamment de pouvoir « s’échapper » de Paris assez facilement et de bénéficier d’un accès à des espaces naturels plus éloignés, mais de bien meilleure « qualité » qu’en Île-de-France.

Or, ce n’est pas le cas des populations les plus démunies des départements limitrophes qui sont contraints à rester dans leurs communes, y compris pendant les périodes de vacances scolaires ».

Sources