Éduquer au développement durable
L’expérience tunisienne
Ahlem Kchaou, février 2023
L’objectif de développement numéro 6 : « Eau propre et assainissement » est en train de devenir un indicateur clé de la nécessité d’intégrer le changement climatique dans les curriculums.
Rappel onusien de cette réalité - aride, avec dans le monde, une personne sur trois ne bénéficiant pas d’une eau potable gérée en toute sécurité, deux personnes sur cinq ne disposant pas d’une installation de base pour se laver les mains avec de l’eau et du savon, et plus de 673 millions de personnes qui pratiquent encore la défécation à l’air libre.
Ahlem Jelalia Kchaou, Inspectrice principale de l’enseignement de base et secondaire SVT, Doctorante en sciences de l’éducation ECOTIDI (UVT) et LIRDEF (UM), présente ce décalage en Tunisie entre la réalité à laquelle sont confrontés les élèves, les familles, la société tunisienne d’une part et la feuille de route de l’Éducation nationale ; les trois réformes éducatives (1958, 1991, 2002) avaient chacune un objectif majeur : l’alphabétisation, la lutte contre l’échec scolaire et la citoyenneté.
À télécharger : etat_lieu_edd_tunisie.pdf (2,5 Mio)
La Tunisie a incorporé l’éducation à l’environnement dans son programme national de protection de l’environnement et dans les programmes d’enseignement et ce dans plusieurs disciplines et à plusieurs niveaux (primaire, collège lycée et université) : Les réformes du système éducatif de 1991 et les textes officiels de juillet 2002 concernant l’École de Demain ont ainsi pour objectif - entre autres - l’acquisition des valeurs essentielles dans l’éducation à l’environnement : la solidarité, la tolérance, l’autonomie et la responsabilité.
En se référant à plusieurs sources dont deux mastères (de biologie et didactique SVT) Ahlem Jelalia Kchaou présente une comparaison entre les objectifs énoncés et les limites identifiées dans l’éducation à l’environnement en 2ème et 5ème année :
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Les disciplines qui abordent le thème de l’environnement se basent sur la description des composants de l’environnement (écologique, sociale, biologique, urbain), l’approche de protections est moins importante, elle se traduit par des conseils, des attitudes et des directives.
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L’environnement en terme de problèmes est faiblement abordé excepté les sciences du vivants qui abordent les problèmes environnementaux qui touchent seulement la nature anthropisée et le milieu urbain et industriel.
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L’enseignement de la gestion de l’eau dans les manuels scolaires tunisiens de SVT et de géographie, ne favorise pas la prise en compte des principes de développement durable.
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Les manuels scolaires n’intègrent pas l’interdisciplinarité en lien avec le DD et l’enseignement de la gestion de l’eau.
L’analyse des textes officiels de la reforme éducative 2002 démontre l’existence des concepts de « compétences », de « l’élève citoyen » et des « éducations à » tandis que les observations sur le terrain montrent un fossé installé entre l’application des recommandations officielles destinées à améliorer la qualité de l’éducation et les pratiques effectives en classe, ce qui a causé l’échec de certains aspects du système scolaire (Maria Lucenti, 2017).
L’éducation informelle comble au mieux et selon les moyens disponibles ce vide laissé par les curriculums officiels. Parmi les acteurs principaux :
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le réseau associatif en Tunisie ;
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les clubs d’environnement ;
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les comités de quartier ;
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les ministères de l’environnement, de l’agriculture, du tourisme, de la santé et de la culture. Nous citons à titre d’exemple le Ministère de l’agriculture qui a organisé les campagnes de sensibilisation à l’importance de la pratique des méthodes permettant d’économiser l’eau surtout dans les régions où sa pénurie est ressentie (à Nabeul, région côtière où la nappe phréatique est salinisée par la mer) ;
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la patrimonialisation de la nature et éducation à l’environnement en Tunisie.