L’expérience du Grand Lyon
Jean-Pierre MARTIN, 2005
Conseil National des Transports (CNT)
Depuis les années 1990, le Grand Lyon considère l’espace public comme un élément majeur de son développement (plan Lumière, multiplication des places et des rues…). De la qualité des espaces publics, le Grand Lyon s’est ensuite concentré sur les usages et les habitants, dans le but de créer une ville accessible. Cette fiche a été rédigée à partir de la présentation sur l’expérience du Grand Lyon de Jean-Pierre MARTIN, architecte ingénieur à la communauté urbaine de Lyon, lors du colloque international organisé par l’IPRAUS et la DRAST « Architectures du transport : territoires en mutation » sur le thème « Espace public et mobilité », le 4 mai 2004.
Barcelone constituant un modèle de ville en Europe pour le travail qu’elle a effectuée sur l’espace public, que ce soit en centre-ville ou en périphérie, dans les quartiers centraux ou dans les quartiers sensibles, sur les places, les rues et les boulevards urbains, le Grand Lyon s’est donc naturellement inspiré de l’approche et des travaux de Barcelone pour les adapter au contexte spécifique lyonnais.
Dès le début des années 90, l’agglomération lyonnaise a donc fait de l’espace public un élément majeur de son développement. Ce changement de l’image de la cité s’est traduit par le « Plan lumière » de Lyon et la politique de construction de très nombreuses places et rues, autant dans la ville centre qu’en périphérie, autant dans les quartiers centraux que dans les quartiers sensibles.
Pour le Grand Lyon la démarche a été empirique et itérative. Elle a de ce fait connu une évolution : d’abord centrée sur des projets visant à la qualité de l’espace public, elle s’est progressivement orientée vers un travail sur les usages, puis sur les habitants. Ce travail sur la qualité de vie des habitants a conduit a soigner les détails des aménagements de proximité.
Outre la hiérarchie des voies instaurée par le Plan Local d’Urbanisme, la ville accessible a été un axe majeur de la politique mise en place par le Grand Lyon. Il s’agissait de rendre la voirie utilisable à pied en ville et de la refaire sur elle-même en tant que « territoire en mutation » en y intégrant la sécurité et la charte du piéton. Une politique d’avancées des trottoirs a été mise en œuvre : dans les angles des rues, on avance les trottoirs pour réduire les traversées. Des lignes d’arrêt ont été mises en place afin que piétons et automobilistes se voient. La tendance étant de supprimer les bancs dans les espaces publics, un travail a été effectué sur des " assis-debout » à partir de la fluidité du piéton, c’est-à-dire en dégageant des trajets pour les piétons.
Mais surtout, plutôt que de vouloir « hacher » les parcours du piéton en créant des îlots, comme cela se pratiquait auparavant en pénalisant les piétons et les personnes à mobilité réduite, le Grand Lyon a cherché des solutions permettant de réduire le parcours des piétons.
Une importante symbiose a été recherchée entre circulations, aménagement et esthétique. Cela a conduit le Grand Lyon à effectuer un travail important sur le déplacement du mobilier, les interfaces, les raccordements, la nature des matériaux, la gestion des arbres, le déplacement des éclairages centraux sur la périphérie des voies, le soin apporté aux passages transversaux, la mise en place de stationnement soigné entre les arbres, le guidage de tous les flux, la fluidité des circulations piétonnières, le recyclage des matériaux.
Les réalisations lyonnaises ont transformé la cité. Cette architecture du global et du détail a mis en relation autant les modes des transports que les modes de vie. Un des objectifs était de briser la logique de l’élargissement des voies. Ces transformations ont amené un changement complet de la mentalité des automobilistes.
Enfin, un travail a été effectué à la fois sur la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre, de façon unique et cohérente. En s’appuyant sur un principe de fabrication et un principe de réflexion, cela a permis d’établir des processus de maîtrise de projets et d’élaboration de guides. Les services « Espaces publics » et « Études de la voirie » ont construit progressivement avec l’ensemble des acteurs un vocabulaire et des méthodes de fabrication de l’espace, partagés avec les concepteurs pour tous les projets, les services d’études, les architectes, autour d’une maîtrise d’ouvrage unique ayant une conduite de projet rigoureuse.
Sources
Ce texte est extrait d’Une Voirie pour Tous – Sécurité et cohabitation sur la voie publique au-delà des conflits d’usage – Tome 2 : Exemples et Annexes au rapport du groupe de réflexion, Conseil National des Transports (CNT), 2005, publié par le CNT et La Documentation Française en juin 2005.