Une conférence de citoyens pour réformer le système électoral en Colombie-Britannique
2016
Cités Territoires Gouvernance (CITEGO)
En 2004, la réforme électorale au Canada est une priorité aux niveaux fédéral, provincial et territorial. Le 31 mars 2004, la Commission de réforme du droit a déposé un rapport et des recommandations au sujet des élections nationales. Dans ce contexte, la Colombie-Britannique a choisi une manière innovante de travailler sur cette réforme.
La Colombie-Britannique (en anglais : British Columbia) est une province du Canada, sur la côte Ouest, bordée à l’est par l’Alberta et au nord par le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest. Elle partage aussi une frontière avec les États-Unis1.
Avec un système de représentation des partis politiques permettant aux partis ayant le moins de voix d’avoir le plus grand nombre de sièges, la démocratie représentative est remise en question au Canada. Dans ce contexte, la réforme électorale est nécessaire. L’État Fédéral de Colombie-Britannique a choisi d’instituer une assemblée de citoyens pour étudier la question de la réforme électorale.
L’innovation de cette assemblée est qu’elle confère tous les pouvoirs de délibération à 160 citoyens de la province choisis au hasard.
Le processus de sélection a été le suivant : tirage au sort à partir des listes électorales. A partir de 15 800 personnes choisies au hasard sur la liste électorale, 160 ont été sélectionnées, selon un protocole strict permettant d’avoir un panel représentatif de la population. Les données de recensement les plus récentes ont été utilisées pour déterminer le pourcentage représenté par les membres de chaque groupe d’âge et de chaque sexe dans chaque circonscription électorale.
R.S. Ratner2 décrit de la manière suivante la phase d’apprentissage : « Les réunions de la phase d’apprentissage se sont toutes déroulées suivant le même modèle, c’est-à-dire que la séance de la matinée commençait habituellement par une brève période de questions et de récapitulation ouverte à l’Assemblée entière et suivie d’un exposé donné par un membre du personnel ou un conférencier invité sur le thème prévu. Venait ensuite une pause-café suivie, pour les douze sous-groupes, d’une heure de discussions qui leur permettait d’analyser plus en profondeur le sujet de la conférence et les documents à lire. Puis, la séance de la matinée se terminait là ou sur une brève plénière de l’Assemblée au cours de laquelle les participants s’échangeaient les résumés des discussions de leurs sous-groupes. Les séances de l’après-midi suivaient grosso modo le même modèle. Les groupes de discussion comptaient de 13 à 15 membres, leur composition changeait d’une fin de semaine à la suivante et leurs membres étaient choisis au hasard afin de permettre des échanges entre le plus grand nombre possible de membres de l’Assemblée. »3
L’Assemblée des citoyens de la Colombie-Britannique sur la réforme électorale (AC) a présenté son rapport final au gouvernement le 10 décembre 2004, après plusieurs semaines de travail.
Le nouveau système électoral que propose l’Assemblée, qui consiste à dire que la province devrait adopter le scrutin à vote unique transférable, qui est une forme de représentation proportionnelle, a été soumis aux électeurs lors d’un référendum, le 17 mai 2005. R.S. Ratner a fait une analyse des débats et délibérations avant le référendum4 afin de comprendre les jeux de pouvoirs, l’implication et le travail de ces citoyens.
Finalement, comme l’Assemblée législative avait fixé le taux d’appui nécessaire au changement à 60 %, le taux récolté de 58 % n’a pas permis de faire adopter la mesure5. Le gouvernement n’a pour autant pas abandonné et souhaite continuer à travailler sur la proposition de l’assemblée citoyenne avant d’organiser un nouveau référendum.
1 Wikipédia : Colombie-Britannique
2 R.S. Ratner est professeur émérite de sociologie au département d’anthropologie et de sociologie de l’Université de la Colombie-Britannique. Pour rédiger le présent article, il a assisté, du 10 janvier au 21 mars 2004, aux réunions de l’Assemblée des citoyens (Citizens’ Assembly) de la Colombie-Britannique à titre d’observateur et a interrogé un échantillon représentatif de délégués à l’Assemblée.
3 Ratner R.S., 2004, L’Assemblée des citoyens de la Colombie-Britannique : la phase d’apprentissage, Revue parlementaire canadienne, vol 27, n°2. p.24
4 Ratner R.S., 2005, L’Assemblée des citoyens de la Colombie-Britannique – Audiences publiques et délibérations, Revue parlementaire canadienne, vol 28, n°1.
5 voir l’article de Kenneth Carty, professeur de science politique et titulaire de la chaire Brenda & David McLean d’études canadiennes à l’Université de la Colombie-Britannique.
Sources
Carty K., 2006, Les solutions des régions aux défis de la réforme électorale, Revue parlementaire canadienne, vol 29, n°1
Herath R.B., 2007, Real Power to the People. A Novel Approach to Electoral Reform in British Columbia, University Press of America, Lanham /Plymouth. 244p.
Mark E. Warren M.E. et Pearse H. (éd.), 2008, Designing Deliberative Democracy: The British Columbia Citizens’ Assembly. New York: Cambridge University Press, 237p.
Ratner R.S., 2004, L’Assemblée des citoyens de la Colombie-Britannique : la phase d’apprentissage, Revue parlementaire canadienne, vol 27, n°2. p.20 - 28
Ratner R.S., 2005, L’Assemblée des citoyens de la Colombie-Britannique – Audiences publiques et délibérations, Revue parlementaire canadienne, vol 28, n°1. p.24 - 33
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