Mutations du travail & des compétences
Mutations du travail & des compétences - Bulletin de veille et de capitalisation d’innovation sociétale - n°66 Juillet 2025
Les compétences des collectivités territoriales reposent sur la capitalisation de l’expérience acquise et sur la mutualisation des expériences
Doter les acteurs de nouvelles compétences, face à de nouveaux défis : une question vieille comme le monde. Trois réponses y sont en général apportées : la mutualisation des expériences avec les acteurs confrontés aux mêmes défis ; la vulgarisation et le conseil ; la formation. Les trois présentent chacune un intérêt mais c’est la première qui est de loin la plus efficace et la mère des deux autres car la connaissance la plus utile à l’action naît de l’action de personnes placées dans la même situation, auxquelles on peut s’identifier. J’ai dirigé pendant trente ans la Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès de l’homme, dont une vocation était de mobiliser le meilleur de la connaissance au service de l’action, dans de multiples domaines et régions du monde et c’est toujours la conclusion à laquelle nous sommes arrivés.
La vulgarisation ne peut pas s’en tenir à un discours descendant, des « experts » vers les « ignorants » ; ça ne marche jamais. D’abord parce que les présumés experts ne connaissent pas le contexte de ceux auxquels ils s’adressent. Ensuite parce que l’expertise est presque toujours sectorielle alors que l’innovation a toujours une dimension systémique. Enfin, parce que l’expert repart avec son expertise, laisse une réalisation mais n’a pas doté les acteurs de terrain d’une compétence durable. L’expertise se fonde toujours implicitement sur des expériences concrètes mais n’en garde que les leçons, sans référence à ces expériences. La bonne solution est que le vulgarisateur se comporte en médiateur de l’expérience, donne aux acteurs qu’il conseille accès à une banque d’expériences dont ils pourront tirer les leçons.
Quant à la formation, elle peut rester théorique tant qu’il s’agit d’initier à des objets techniques mais, dès lors qu’il s’agit de processus d’innovation, elle doit à son tour se référer à des expériences concrètes faute de quoi, comme c’est trop souvent le cas, elle se limite à un discours désincarné sur les méthodes à suivre. Et elle sera d’autant plus efficace qu’elle est prolongée ensuite par un réseau humain d’échange d’expériences.
Chacun est maintenant conscient que les territoires ont un rôle majeur à jouer dans la conception et la conduite de la transition vers des sociétés durables et que cette transition est systémique, suppose une transformation simultanée menée dans de nombreux domaines. Mais à voir ce qui se passe réellement sur le terrain on constate que cette affirmation reste rhétorique : on dit mais on ne fait pas. Parce que l’organisation même des collectivités territoriales pousse à des politiques en silo. Parce que les expertises convoquées sont sectorielles. Parce que le partage des champs d’activités et des responsabilités n’encourage pas les coopérations multi-acteurs et la coproduction du bien public. Mais il y a plus : les sites web des organisations et réseaux qui prétendent promouvoir des transitions systémiques sont eux-mêmes structurés de manière sectorielle et les expériences présentées, quand elles existent, sont indexées par des mots clé eux-mêmes sectoriels ! Et, qui plus est, aucune mutualisation entre les dizaines d’organisations et réseaux qui promeuvent la transition : chacun « court dans son couloir ». Quelle déperdition d’énergie !
C’est à ces défis que veut répondre la création d’une Communauté de sites ressources sur les territoires et la transition, CORETET. Les outils techniques sont parfaitement au point, reposant sur l’expertise de ’association CITEGO, Cités, territoires, gouvernance, www.citego.org qui a construit au fil des années une banque l’expériences riche de plus de quatre mille cas, en français, anglais et espagnol, issus de France, d’Europe et du reste du monde. Toutes sont indexées par un outil unique en son genre, l’atlas relationnel, qui fait apparaître les liens entre les différentes dimensions de l’action. Dès lors qu’une banque d’expérience est bien structurée, conformément aux normes de présentation universelles, c’est un jeu d’enfant d’entrer une expérience dans le site de la CORETET, qui renvoie au site de chaque partenaire et valorise ainsi ses ressources documentaires, la multiplicité des membres de la communauté assurant un excellent référencement du site commun sur les moteurs de recherche d’internet. Prêts à tester ? Il suffit de nous envoyer un message à citego@citego.org et nous vous enverrons un mot de passe et un tutoriel.
Et l’IA dans tout ça ? Ne dispensera-t-elle pas bientôt de tous ces efforts ? Au contraire, elle vient compléter le dispositif en aidant, sur toute question qui vous intéresse, à tirer les leçons de la banque d’expériences de CITEGO en exploitant son corpus. Et ce sera plus vrai encore avec le corpus de la CORETET. Mais sans banque d’expériences sérieuse à la clé, l’IA n’inventera pas des ressources documentaires qui n’existent pas.
Pierre CALAME, Fondateur de CITEGO
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