L’implication des citoyens dans les projets urbains grâce aux TIC : le cas de New York
Jean DANIELOU, 2014
Problématique : Comment faire la ville avec les citoyens ? Comment faire que ceux-ci ne soient pas simplement les usagers finaux, mais aussi les partenaires des projets à venir ? Dans le droit fil de la tradition états-unienne de l’« empowerement » (traduit en français par capacitation), la ville de New York a d’abord expérimenté une plateforme collaborative appelée Give a minute, puis, à partir du succès de cet essai, a lancé le site internet Change by Us.
Le principe de ce service en ligne repose sur d’anciennes bases. En effet, au départ, il y a le centre d’appel 311 qui reçoit des demandes d’informations émanant des citoyens. Ce dispositif de communication téléphonique a pour fonction principale de fournir toutes les informations dont dispose la municipalité sur l’état de fonctionnement de ses services. L’efficacité de ce service vient de son fonctionnement centralisé qui évite aux usagers de la ville de rechercher le centre d’appel adéquat à leur demande. Il s’agit donc d’un pas décisif dans la structuration de services informationnels permettant aux citoyens de disposer presque instantanément d’informations multiples. Cependant, ce dispositif assigne au citoyen le rôle de consommateur final. L’information, en ce cas, ne circule que dans un sens : de la municipalité vers les personnes s’adressant au centre d’appel.
Le lancement de la plateforme Give a minute renverse le flux d’informations en faisant du citoyen-usager la source d’information qui, en se connectant sur internet, peut transmettre à la ville de New York des informations que les services municipaux n’auraient pas eu autrement. Le principe technique sous-jacent au lancement de cette plateforme d’essai est le crowdsourcing.
Par ce terme, traduit en français par externalisation ouverte et collaborative, il faut entendre, au sens littéral, un approvisionnement par la foule. Via internet, les citoyens-usagers peuvent créer un nouveau contenu informationnel dont la municipalité est susceptible de se saisir pour optimiser le fonctionnement de ses services.
Le lancement de la plateforme Give a minute (service que l’on retrouve dans d’autres grandes villes états-uniennes, dont Chicago), développée par l’entreprise de design de media Local Projects, a été permis par le réseau-laboratoire d’innovation CEOs for Cities et des fonds fournis par les fondations Knight et Rockfeller. Give a minute appelle les citoyens-usagers à passer au moins une minute à réfléchir et à poster une suggestion sur le fonctionnement de la ville.
A partir de ce premier projet, la ville de New York a lancé la plateforme Change by Us qui s’adresse en ces termes aux citoyens-usagers « How can we make our city a greener, greater place to live ? ». La ville de New York décrit cette plateforme comme un nouveau réseau social pour les citoyens capables de prendre en charge les problèmes urbains et environnementaux. Le but affiché est donc de rompre avec une logique top down, de permettre à un mouvement bottom up de se constituer via cette plateforme et de donner à ce groupe la possibilité de participer à l’élaboration des décisions publiques. Autrement dit, plus encore qu’une évolution des services d’information urbains (comme le centre d’appel 311), il s’agit ici d’une refonte du système de fonctionnement des services municipaux qui s’adressent aux citoyens-usagers comme à autant d’experts du territoire. La technologie du crowdsourcing renverse la logique top down et permet à la ville de passer de la simple information fournie aux citoyens à une interaction réelle avec ces derniers.