Les observatoires locaux de la demande sociale en logement de Lyon : ALPIL
2004
Association Internationale de Techniciens, Experts et Chercheurs (AITEC)
Cette fiche présente le dispositif ALPIL dont l’objectif est de fournir aux partenaires, intervenant sur le territoire, les informations nécessaires à la construction d’une stratégie d’intervention pour le logement des mal-logés.
Origine du projet
Le premier dispositif d’observation permanente a été créé en 1989 dans le 3e arrondissement de la ville de Lyon.
C’est la volonté de connaître les besoins en logement à travers l’analyse de la demande qui a constitué la base d’une démarche partenariale réunissant douze lieux d’enregistrements de la demande : le service logement (SIAL) de la Préfecture, trois Maisons du Département, la mairie du 3ème arrondissement, son CCAS (centre communal d’action sociale), un aménageur, deux organismes bailleurs sociaux, un organisme spécialisé et deux associations. Depuis, le dispositif a été étendu à d’autres arrondissements. Ainsi, en 2002, l’ALPIL (Association Lyonnaise Pour l’Insertion par le Logement) a animé les observatoires locaux de la demande sociale en logement des 3e, 6e, 7e et 9e arrondissements.
C’est en mettant en évidence, auprès des partenaires impliqués dans la démarche, le caractère incomplet de la demande de logement enregistrée au niveau des fichiers existants que cet engagement partenarial a pu être consolidé.
Par ailleurs, la volonté de construire cette fonction d’observation dans le cadre d’un rapport particulier avec les mairies concernées a permis dès le départ une adhésion politique au projet.
Pour l’ALPIL, l’originalité et la richesse du dispositif reposent sur ses capacités à allier une approche quantitative et qualitative des besoins à un travail en continu de mobilisation des partenaires et de recherche de nouvelles réponses. Ces deux approches n’ont d’intérêt que dans leur interactivité et dans leur enracinement au niveau local. Dans un contexte de pénurie de l’offre, d’une complexification des situations individuelles et d’une baisse des subventions publiques, le soutien à cette dynamique partenariale est essentiel.
Méthode et dispositif
Pour la recherche d’un logement, les personnes et les familles qui éprouvent des difficultés diverses liées à leur situation sociale, familiale ou économique, à leur origine ethnique ou à leur statut locatif s’adressent à des lieux d’accueil. Ces lieux d’accueil et d’enregistrement de la demande constituent des fichiers qui rassemblent les informations estimées nécessaires. Ces fichiers sont le résultat de la relation que chaque organisme ou institution entretient avec les ménages.
L’Observatoire local du logement rassemble et généralise les données à partir de ces « fichiers sources » en les soumettant à des critères communs. Il va puiser dans ces fichiers les éléments qui permettent l’identification des ménages (noms), la taille et la caractéristique des ménages (y compris le statut locatif), la localisation de l’habitat actuel (adresse, zone), les motifs qui permettent de repérer les dysfonctionnements liés à des aspects collectifs. L’observatoire élimine les doubles comptes et effectue un tri par localisation (géographique et statutaire), type de ménages (statut, taille, nationalité, nature des ressources), motif et nature de la demande. Aucune censure n’est appliquée au niveau de la prise en compte de la demande : elle doit apparaître même si elle est bloquée. Le relogement des ménages concernés ainsi que la demande sociale non satisfaite sont également pris en compte.
L’Observatoire n’est pas un outil opérationnel ; c’est avant tout un lieu de connaissance au service de la politique locale de l’habitat et dans ce cadre, l’intervention en faveur des mal-logés. Les acteurs qui alimentent l’Observatoire ont des fonctions différentes. Cette confrontation des regards sur un quartier donné produit des réajustements intéressants pour les acteurs intervenant sur ce même territoire. Ainsi, la question du fonctionnement se pose dès lors que l’on définit l’objet de l’observation de telle sorte que ce dernier induit un traitement de la demande : comment maîtriser le rapport entre ceux qui transmettent des informations et ceux qui sont en relation avec les demandeurs ?
L’Observatoire produit des rapports destinés à l’ensemble des acteurs qui alimentent le dispositif d’observation dans une logique de débat et mettent en évidence un certain nombre de points méritant d’être approfondis.
Des groupes de travail sont alors constitués en réponse à cette première étape de connaissance. On peut donc parler de production collective.
Le mode d’intervention de l’équipe est collectif : les Observatoires sont tous gérés et animés par deux ou trois personnes aux formations différentes. Les données recueillies restent confidentielles et propriété des partenaires impliqués. Elles ne sont pas publiées. Aucune liste nominative ne peut être communiquée. On ne restitue aux partenaires que les résultats qui les concernent. Enfin, les informations communiquées hors de l’Observatoire se limitent aux seules statistiques à l’exception de toute donnée brute.
Évaluation et perspectives
Suite à l’appel d’offre lancé par la Communauté Urbaine pour l’animation du dispositif d’observation sur 5 sites pour les années 2003-2005, l’ALPIL a été retenue pour les observations du 1er, 3e, 6e, 7e et 9e arrondissements.
L’observatoire est la clé de voûte du dispositif général d’intervention.
L’intérêt ne se situe pas dans la réponse individuelle à des besoins mais dans la capacité à définir une stratégie d’intervention à partir de la connaissance des situations et l’analyse de leurs évolutions dans le temps. Le premier enjeu est de connaître la population des mal-logés en vue de fournir des données utiles pour que les partenaires qui interviennent sur le territoire puissent construire une stratégie d’intervention.
L’Observatoire de la demande de logement est en permanence à la recherche d’un point d’équilibre difficile à trouver entre un outil de méthode, porteur d’une certaine démarche et un outil de gestion, porteur d’une stratégie d’intervention sur le territoire.
L’Observatoire peut se positionner par rapport à la demande de deux manières :
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une fonction de portage de la demande des populations défavorisées ;
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une fonction d’outil d’appui à l’action. En dégageant une photographie actuelle de la situation locale, il donne une vision de l’évolution de la demande et de sa satisfaction.
Les éléments de bilan des groupes de travail viennent enrichir cette photographie générale et locale. Dans le même temps, cette connaissance territorialisée, d’autant plus fine qu’elle mêle des sources d’informations diverses, alimente les groupes de travail. Cette connaissance relayée au niveau central permet de déterminer les priorités des actions programmées au niveau de la ville, de l’agglomération ou du département.
L’Observatoire local permanent est ainsi un outil au service de la politique de l’habitat. A ce titre, il alimente la réflexion sur les questions essentielles qui précèdent les décisions :
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adéquation de l’offre et de la demande ;
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approche des immeubles sensibles ;
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approche des populations sensibles (par exemple problèmes des hébergés et plus globalement des sans domicile) ;
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suivi de la mobilité (relogement définitif ou relogement non satisfaisant).
Il est à l’origine de dispositifs d’intervention adaptés :
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cellules de crise (cas collectifs ou individuels difficiles) ;
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commissions locales d’urgence ;
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dispositif d’orientation des attributions ;
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mise en place de procédures adaptées (exemple de la RHI multi-sites sur le 3e arrondissement).
Le rapport permanent au terrain présente toutefois certains dangers dont il faut avoir conscience : la nécessité permanente d’agir s’oppose parfois à la logique d’observation, qui n’est pas directement opérationnelle. L’Observatoire est bien un outil pour comprendre avant d’être un outil pour agir. A ce titre, la volonté politique est absolument nécessaire pour éviter de faire de ces Observatoires locaux un outil directement utilisable pour l’action au risque d’une moindre compréhension des phénomènes.
Para ir más allá
Le site de l’ALPIL et le rapport d’activité de l’année 2016