Le Pôle Métropolitain du Genevois français : capter un trafic routier croissant, au sein d’un espace métropolitain transfrontalier très dynamique
septembre 2023
Le Pôle Métropolitain du Genevois français (PMGF) est une institution regroupant 8 EPCI français répartis entre les départements de l’Ain et de la Haute-Savoie. Instrument de coopération interterritoriale, le PMGF est également historiquement lié à la coopération transfrontalière avec la Suisse1. Jusqu’en 2019, ses prérogatives se limitaient à des missions de planification stratégique, d’études et de suivi. Depuis la LOM, le PMGF s’est également doté d’une compétence opérationnelle, relative aux nouvelles mobilités (covoiturage et autopartage). Dès lors, plusieurs leviers ont pu être activés afin de développer la pratique du covoiturage. Certaines des politiques publiques visant cet objectif sont co-financées ou mises en place par d’autres structures comme le Canton de Genève ou Autoroutes et Tunnel du Mont Blanc (ATMB), société concessionnaire des autoroutes du territoire.
Personnes interrogées :
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Chrystelle Beurrier, 2e vice-présidente du Pôle métropolitain déléguée au développement des modes actifs et aux services à la mobilité, élue de Thonon agglo
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Florian Grange, chef de projets Innovation et Développement chez Autoroutes et Tunnel du Mont Blanc (ATMB)
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Marianne Grassaud, chargée de mission services à la mobilité au PMGF
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Yvan Moglia, chargé d’études mobilité au PMGF
Une « métropole de petits villages » en proie à des enjeux de mobilité prégnants
Dans sa feuille de route 2020 – 2026, le Pôle métropolitain fait de « l’effort de transformation des mobilités » une priorité 2. Les enjeux de mobilité auxquels se confrontent le PMGF sont liés à la hausse des kilomètres parcourus et des déplacements réalisés (+2,5 % de trafic routier chaque année). Cela s’explique notamment par l’attractivité de la métropole de Genève, qui concentre les emplois et attire de plus en plus d’actifs français. Ainsi, le nombre d’actifs transfrontaliers a été multiplié par 3 entre 1999 et 2013, et 42 % des km parcourus chaque jour sur le territoire du Genevois français concernent des trajets transfrontaliers. Le PMGF connait une croissance démographique soutenue, de +2,1 % par an depuis dix ans, bien plus élevée que le taux annuel au niveau national (+0.3 %). Cela signifie que 10 000 nouveaux habitants s’installent chaque année sur le territoire. Le phénomène de métropolisation s’accentue et déborde même des frontières du Genevois français : un trafic important provient d’Annecy, en direction de Genève. En conséquence, le PMGF enregistre d’importantes congestions routières avec la concentration des flux sur certains axes (on dénombre 400 000 passages de douanes quotidiens) 3. Le déséquilibre entre emplois et actifs s’observe également par une concentration de la construction de logements côté français (67 % du parc de logements neufs a été construit dans le Genevois français), dont la majorité sont des logements individuels, à l’inverse du Canton de Genève. Aussi, on constate en parallèle un phénomène d’étalement urbain dans les espaces périphériques français qui enregistrent le taux de croissance démographique le plus élevé à l’échelle du Grand Genève. La combinaison des phénomènes d’étalement urbain et de concentration des flux vers la métropole de Genève est résumée par l’expression de « métropole faite de petits villages », utilisée par l’élue en charge des mobilités partagées, Chrystelle Beurrier, et les techniciens du PMGF, pour qualifier le Grand Genève et le territoire du PMGF.
Les déplacements à l’échelle du Genevois et en particulier le trafic routier sont sources d’impacts conséquents sur l’environnement et la qualité de l’air. Les transports constituent 38 % du bilan carbone du Grand Genève 4. La voiture reste prédominante pour les déplacements au départ ou à destination du Pôle métropolitain (67 %) tandis que les transports en commun ne sont utilisés que pour 6 % des trajets. L’offre en transport en commun est inférieure de 20 % par rapport à des territoires comparables 5. Elle s’est étoffée en 2019 grâce à la mise en service du Léman express, réseau express régional transfrontalier. La part modale des transports en commun a augmenté notamment à Annemasse / Thonon-Chablais (+7 points) et dans la vallée de l’Arve (+8 points) alors qu’elle était auparavant inexistante dans ces régions 6. Toutefois, le développement de l’offre de transports en commun ne va pas aussi vite que la croissance démographique particulièrement soutenue sur le territoire. De plus, cette offre est surtout concentrée sur les flux transfrontaliers, alors que 50 % des déplacements domicile-travail sont internes au Genevois français. L’étalement urbain et l’habitat diffus des régions périphériques rend plus difficile le développement de transports en commun performant permettant de couvrir l’ensemble des flux.
Le covoiturage principalement développé pour faire face à la pression du trafic routier, en constante augmentation
Le PMGF s’est fixé, dans son schéma métropolitain des mobilités (2017) l’objectif de doubler la part modale du covoiturage, pour tout motif, en passant de 4 % et 8 % d’ici 2030. Cette augmentation doit être portée par le développement du covoiturage organisé (par plateforme), soit environ 36 000 trajets quotidiens à horizon 20307.
Le covoiturage, ainsi que le report modal vers les transports en commun et les modes actifs, doivent permettre de résorber l’augmentation continue du trafic routier due à la croissance démographique du territoire, puis de résorber le trafic automobile. Le covoiturage participe fortement à cet objectif selon les projections du schéma métropolitain des mobilités : le schéma (réalisé avant la pandémie de Covid de 2020 – 2021) prévoyait pour 2020 une participation à la réduction de la hausse du trafic (+ 70 000 voitures particulières en 2020) de 41 %, plus élevée que les modes actifs (38 %) et les transports collectifs (18 %). Entre 2017 et 2020, la part modale du covoiturage devait passer à 6 %, dont 2 % en covoiturage organisé, soit 18 000 trajets quotidiens. Par la suite la participation du covoiturage reste importante.
Au-delà de la résorption du trafic automobile, le covoiturage est également perçu comme le moyen de répondre plus finement que les transports en commun aux besoins de mobilité, soit sur des axes desservis par une offre de transports en collectif où les ruptures de charges ou les temps de parcours ne correspondent pas aux besoins, soit sur des axes peu ou pas desservis. L’objectif d’équité territorial est aussi avancé par le PMGF, en rémunérant davantage les trajets internes par rapport aux trajets en échange avec d’autres territoires (voir ci-dessous les modalités de la politique d’incitations financières). En effet, il y a des inégalités de rémunération entre actifs travaillant côté français et actifs transfrontaliers. Enfin, favoriser le covoiturage, comme l’autopartage, permettrait de changer l’image de la voiture. Pour C. Beurrier, c’est un objet qui a été sublimé pendant très longtemps alors qu’il devrait être ramené à la « boite qui permet de faire des trajets, en redevenant juste un mode de transport ».
La société gestionnaire des Autoroutes et Tunnel du Mont Blanc (ATMB) investit également des moyens financiers dans certaines politiques de covoiturage du PMGF ou du Canton de Genève. « Cela peut paraitre contradictoire pour ATMB de faciliter le covoiturage, surtout les parkings de covoiturage avant le passage du péage, car cela signifie moins de recettes. Mais les équipes d’ATMB ont la conviction, depuis longtemps, que le covoiturage est un outil essentiel pour améliorer l’efficacité du système de transport, optimiser l’usage des infrastructures routières et limiter les impacts du trafic routier toujours croissant. Le covoiturage répond aussi aux mutations sociétales en cours » explique Florian Grange, chef de projets chez ATMB. Le covoiturage doit également permettre d’optimiser les infrastructures en désaturant les axes, alors même « qu’il y aura toujours plus de personnes sur notre réseau » du fait de la croissance démographique, mais « qu’il n’y aura pas d’élargissement des autoroutes, car ce n’est plus dans l’air du temps ». Enfin, le co-financement d’une campagne d’incitations financières est décrit comme un élément complémentaire pour inciter au covoiturage, en plus de la voie réservée et des aires de covoiturage. ATMB se présente comme « l’acteur autoroutier français le plus innovant et le plus engagé pour le développement du covoiturage au quotidien » du fait de l’offre de places de parking de covoiturage la plus élevée de France (rapporté à la taille de son réseau) 8.
Quatre leviers des politiques de covoiturage pour attirer les autosolistes vers le covoiturage
Le ciblage des politiques de covoiturage est au départ assez large : « Au départ on ne sait pas trop qui on va viser. Il faut aller chercher celui qui a de la place dans sa voiture et qui passe sur un des axes structurants », explique la Collectivité. Les trajets réalisés sont constatés en aval des campagnes d’incitations, en analysant les trajets enregistrés par le RPC. Sur un territoire plus vaste que le PMGF, une stratégie covoiturage détermine un ciblage plus précis et restrictif du covoiturage. Cette stratégie, publiée en 2020, a été réalisée par le bureau de recherche 6-T pour le compte du Grand Genève, sous le pilotage du PMGF et dans le cadre du programme européen Interreg 9. Elle concerne le bassin lémanique, le territoire autour du lac Léman de part et d’autre de la frontière franco-suisse. Cette stratégie détermine les axes prioritaires pour développer le covoiturage, en ciblant les secteurs géographiques les plus pertinents sur le bassin lémanique. Elle appelle à concentrer les efforts pour les trajets où l’on observe déjà des pratiques informelles (trajets domicile-travail de 15 km ou plus, dans des secteurs d’activité et d’emplois propices à cette pratique). Elle met enfin l’accent sur l’efficacité des mesures qui favorisent les covoitureurs et pénalisent les autosolistes (stationnements, goulets d’étranglement), qui doivent constituer les principaux leviers d’encouragement.
Le PMGF présente sa démarche d’encouragement du covoiturage au travers de quatre leviers. Le premier levier est la communication, qui a constitué le premier exercice de la compétence opérationnelle obtenue par le Pôle. Ainsi, en 2019, le PMGF reprend la gestion du moteur de recherche « covoiturage-léman » (jusqu’alors géré par le Département) et financé en partie par le fonds européen Interreg. Le site covoiturage-léman permet de rechercher des trajets de covoiturage proposés au niveau du bassin lémanique, via les plateformes de plusieurs opérateurs de covoiturage partenaires, ainsi que les trajets mis en ligne sur des groupes informels via Facebook ou Whatsapp. Il faut ensuite se rendre sur les différentes plateformes et applications pour poursuivre la mise en relation et former l’équipage de covoiturage. Le site internet recense aussi les lignes de covoiturage mises en place.
Le deuxième levier repose sur le développement d’infrastructures favorisant la pratique du covoiturage. Le PMGF a expérimenté à partir de 2019 des lignes de covoiturage dynamiques : l’une transfrontalière entre la Communauté de communes du Genevois et le Canton de Genève, l’autre interne au Genevois français. Les lignes ont été exploitées par Taxito et Mobicoop, puis Ecov, qui détient aujourd’hui la gestion de l’ensemble des lignes sur le territoire. Les aménagements infrastructurels ont aussi concerné l’expérimentation d’une voie réservée aux covoitureurs au niveau de la douane franco-suisse (douane Thônex-Vallard, sur l’autoroute A411), un lieu très congestionné. Mise en place par ATMB et le Canton de Genève depuis octobre 2018, elle est ouverte le matin de 6h à 9h en direction du territoire suisse et de 15h30 à 18h30 vers la France. Pour cet aménagement, la voie de gauche jusqu’alors réservée aux transfrontaliers, est devenu réservée aux covoitureurs, tandis que la voie de droite, très peu utilisée et réservée aux bus et poids lourds, s’est aussi ouverte aux voitures. Ainsi, la voie réservée aux covoiturages n’a pas réduit les voies disponibles aux autosolistes, puisqu’une nouvelle voie leur a été ouverte en contrepartie. Ne pas dégrader les conditions de circulation de tous les usagers faisait partie des objectifs fixés au départ de l’expérimentation 10.
Le troisième levier repose sur les incitations financières. Elles sont présentées comme « une sorte d’appât » par Yvan Moglia, pour diriger les autosolistes vers le covoiturage, « si possible de façon pérenne ». Une première opération “Je Covoit” a été menée avec l’opérateur Klaxit, pour les trajets domicile-travail. Par la suite, le PMGF a établi une campagne ouverte avec plusieurs opérateurs de covoiturage (Blablacar Daily, Klaxit, Karos, Mobicoop, Mov’ici), pour les trajets effectués via ces applications. La première campagne, co-financée entre le PMGF et ATMB, dédiait 30 000 euros aux incitations. Elle s’est étendue du 13 juin au 3 août 2022. La seconde campagne, financée par le PMGF, a débuté le 2 novembre 2022 : l’enveloppe initiale de 100 000 euros a été entièrement consommée avant la fin du mois d’avril 2023. En mai 2023, une nouvelle campagne, de 200 000 euros, a été annoncée : elle est co-financée par le PMGF et ATMB, avec l’objectif de s’étendre jusqu’à décembre 2023. Les opérateurs partenaires sont Blablacar Daily, Klaxit, Karos et Ecov (lignes Hé !Léman).
Au vu des modalités de la première campagne, le coût au trajet moyen s’est élevé à 4 euros, et il a pu atteindre 6 euros par passager (dans le cas de trajets internes au Genevois français). Les niveaux d’incitations ont été abaissés par la collectivité pour la deuxième campagne d’incitations pour faire durer l’enveloppe dans le temps :
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Pour les trajets internes : 2 euros par passager entre 4 et 20 km, et 10ct/km supplémentaire (entre 20 et 40 km), pour un maximum de 4 euros par passager
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Pour les trajets en échange : 1 euro par passager, et 10ct/km supplémentaire entre 20 et 40 km, pour un maximum de 3 euros par passager.
Pour la troisième campagne d’incitation, initiée en mai 2023, un plafond de gains mensuels de 120 euros a été fixé pour les conducteurs bénéficiaires des incitations.
Enfin, le quatrième levier est qualifié par le Pôle de « valorisation des points de rencontre existants » où l’on observe déjà des pratiques de covoiturage informel, avec notamment la volonté de sécuriser ces pratiques. Cette volonté de sécurisation des pratiques est également mentionnée par ATMB, par la création de nouveaux parkings là où l’on observe déjà des pratiques informelles de covoiturage, via du « stationnement sauvage » pouvant entraîner des risques d’accident. ATMB souhaite également répondre aux demandes des clients de son réseau.
Ces quatre leviers doivent, selon C. Beurrier, permettre de donner une « acculturation au covoiturage », une pratique qui n’est pas innée, surtout dans les territoires les moins denses : « Dans les territoires les moins denses, là où il y a le plus de bénéfices à aller chercher sur la transition écologique [avec le covoiturage], l’acculturation est la plus compliquée à mettre en oeuvre. Il y a une telle habitude d’utiliser la voiture dans ces territoires, qu’on l’utilise pour des tout petits trajets. Ce sont des territoires qui sont moins touchés, en apparence, par l’impact des pollutions. »
Quels résultats obtenus dans la massification de la pratique du covoiturage ?
Le schéma métropolitain des mobilités du PMGF, estime qu’en 2015, 4 % des trajets quotidiens sont réalisés en covoiturage 11, soit environ 36 000 trajets quotidiens. D’ici 2030, une part équivalente doit s’additionner aux pratiques informelles existantes grâce au covoiturage via plateforme et aux politiques publiques de soutien.
Les résultats obtenus par les politiques de covoiturage du PMGF nous renseignent sur la dynamique récente du covoiturage par plateformes sur le territoire. Pour le covoiturage planifié, 7 425 trajets ont été enregistrés lors de la première campagne d’incitations (entre juin et août 2022). Le PMGF estime que les incitations ont permis une hausse de l’usage de 40 % par rapport au mois précédent. Les plateformes ont enregistré sur la zone concernée une hausse de 50 % d’inscriptions de nouveaux inscrits. Les EPCI membres du PMGF, à l’instar de la dynamique observée au niveau national, ont vu le nombre de trajets doubler début 2023. Pour les lignes de covoiturage, le nombre de trajets varie selon les lignes du territoire. Entre janvier 2022 et janvier 2023, 7 491 trajets ont été proposés par des conducteurs sur les lignes 12. « Le succès est mitigé, par rapport à ce qu’on peut voir sur d’autres territoires. » observe Y. Moglia.
Comme pour les autres collectivités étudiées, il est difficile de savoir si les trajets enregistrés par le RPC provoquent de nouveaux usages ou révèlent des pratiques existantes via un effet d’aubaine. En effet, dans le panel mobilité du Grand Genève 2021, les parts modales du covoiturage sont équivalentes entre la France et la Suisse : en ne s’attachant qu’aux trajets réalisés en voiture vers le travail ou un lieu de formation, 9 % des répondants au panel déclarent faire du covoiturage au moins ponctuellement, un niveau en baisse d’environ 3 % entre 2019 et 2021 (correspondant aux deux vagues d’enquête du Panel mobilité). En revanche, le taux d’inscription à des plateformes est bien plus importante côté français (15 % des résidents français contre 3 % des résidents suisses). L’usage de plateformes de covoiturage intermédié est donc beaucoup plus prononcée côté français. Le panel mobilité date cependant de 2021 et est donc antérieur aux politiques d’incitations de 2022. La Collectivité a d’ailleurs la volonté d’évaluer la variation du covoiturage informel dans sa prochaine EMC2 en 2023.
L’expérimentation de la voie réservée au niveau de la douane franco-suisse, après 3 ans de mise en place, donne aussi des premiers résultats pour son évaluation. Menée par le Cerema, l’évaluation conclut à un effet positif de la voie réservée sur la congestion : le nombre de bouchons (durée et longueur) s’est réduit depuis la mise en place de la voie, améliorant nettement les temps de parcours vers la Suisse le matin, l’axe le plus congestionné. 39 % des covoitureurs interrogés dans le cadre de l’évaluation déclarent que la voie de covoiturage les a incités à covoiturer. Une majorité de covoitureurs estime gagner du temps tandis qu’une majorité de non-covoitureurs estiment en perdre depuis l’ouverture de la voie. Après 3 ans de fonctionnement de la voie, 20 % des non-covoitureurs sont prêts à covoiturer pour l’utiliser tandis qu’une majorité (62 % des interrogés) déclarent ne pas être intéressés par ce dispositif. Pour autant, l’évaluation rapporte que le nombre de covoitureurs est équivalent par rapport au début de l’ouverture de la voie et que le nombre d’autosolistes a augmenté. Cela s’explique notamment par le fait que l’ouverture de la voie réservée a en réalité permis d’ouvrir une nouvelle voie de circulation, en augmentant la capacité d’écoulement du trafic au niveau de la douane. L’amélioration des temps de parcours a concerné les usagers de la voie de covoiturage (gain de 9 minutes), mais aussi les usagers des autres voies (3 minutes 40). Au final, malgré une augmentation du trafic global depuis 3 ans, le trafic est plus fluide depuis l’ouverture de la voie réservée.
Pour favoriser davantage les covoitureurs par rapport aux autosolistes, ATMB souhaiterait améliorer le respect de l’usage de la voie réservée, et réfléchit à la mise en place d’un système de contrôle par vidéo et levée de barrière au niveau de la voie.
Les mobilités partagées, seules politiques publiques opérationnelles du PMGF pour concrétiser des réflexions sur l’équilibre du territoire et les mobilités à l’échelle du bassin de vie
Les politiques de covoiturage constituent, à l’heure actuelle, l’une des seules politiques opérationnelles développées par le Pôle Métropolitain pour l’ensemble des EPCI membres. Le reste de la compétence mobilité est exercée de manière différente selon les EPCI. Afin de mutualiser la
planification et la mise en place des transports au niveau du Pôle, le PMGF travaille à devenir AOM commune de ses EPCI membres d’ici 2025 L’organisation commune de la mobilité est encore en projet, avec des modalités allant de l’intégration volontaire de l’EPCI à l’AOM, à une convention de partenariat entre l’EPCI et le PMGF sans pour autant intégrer pleinement le projet pour le moment 13. Un certain nombre de freins politiques et institutionnels persistent, ainsi que des choix encore en suspens sur la gouvernance ou le financement. Ainsi, même si le PMGF « a les mêmes problématiques qu’une métropole sans être organisé de la même manière d’un point de vue politique sur le périmètre » selon Chrystelle Beurrier, élue du PMGF, la compétence sur les mobilités partagées reste la seule compétence opérationnelle transférée au PMGF, ce qui limite sa capacité d’action sur les autres leviers de décarbonation des transports.
Le Pôle joue cependant un rôle de sensibilisation et d’information sur ces thématiques auprès de ses EPCI membres, afin de penser cette thématique à l’échelle pertinente du bassin de vie, comme le présente C. Beurrier : « Le Pôle métropolitain ouvre les yeux sur des orientations stratégiques, des politiques publiques complémentaires, qui sont dans des visions d’avenir plus lointaine. Tout d’abord parce que le Pôle n’a pas à traiter les questions de gestion quotidienne comme les intercommunalités et les communes. Il peut donc développer une ingénierie pour penser l’avenir du territoire. De plus, le périmètre des EPCI est trop petit pour travailler ces nouvelles mobilités tandis que le périmètre du PMGF peut se révéler plus adapté. Enfin, le coeur de l’ADN du Pôle est la transition écologique. »
L’échelle du Pôle métropolitain est présentée comme une échelle pertinente pour ces « nouvelles mobilités ». Cela souligne l’intérêt de penser les thématiques comme le covoiturage au-delà du ressort territorial des EPCI. L’attractivité d’une métropole étrangère attire des flux importants d’EPCI différents, et des flux d’échanges entre la France et la Suisse. La création du PMGF s’explique notamment par la volonté de structurer une coopération interterritoriale afin de « peser face à des dynamiques dépassant les capacités d’action des différentes collectivités territoriales françaises. » 14 Peser face à la métropole de Genève et à la Région Auvergne-Rhône-Alpes fait partie des bénéfices attendus par le projet d’AOM commune au Genevois français 15. Au-delà de la seule question de la mobilité, c’est bien l’enjeu d’un aménagement du territoire équilibré qui se pose et qui est particulièrement important pour les EPCI membres du PMGF. Il s’agit de faire face aux différents impacts liés à l’accentuation de la métropolisation, notamment le déséquilibre entre emplois et résidents provoqué par l’attrait de Genève pour les actifs français.
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1 Le PMGF est intégré au Grand Genève, une institution transfrontalière réunissant le canton de Genève, le district de Nyon et le Pôle métropolitain du Genevois français. Comptant plus d’un million d’habitants, le Grand Genève est défini comme un territoire, un bassin de vie et une instance juridique organisée en Groupement local de coopération transfrontalière (GLCT).
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2 Feuille de route du PMGF (2020-2026), cité dans Grassaud, Marianne. « L’intégration métropolitaine par les enjeux de mobilité : le projet d’AOM du Genevois français », Mémoire, Master Gestion des territoires et développement local – Politiques territoriales de développement durable, Le Mans Université, 2022, p. 62.
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3 Dégrémont, M. (2019) « La mobilité dans le Grand Genève : quelles pistes pour un développement territorial équilibré et durable ? » France stratégie, document de travail.
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4 Le rapport de France stratégie donne d’autres indicateurs comme la qualité de l’air, qualifiée de moyenne à très mauvaise 129 jours en 2016 dans le Genevois, contre 93 jours en Ile-de-France. Les émissions d’oxydes d’azote (NOx) sont dues pour 75 % au trafic routier contre 54 % au niveau français. (Dégrémont, 2019).
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5 Source : Site Pole métropolitain du genevois français. www.genevoisfrancais.org/mobilite/
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6 Selon les résultats longitudinaux des vagues d’enquêtes 2019 et 2021 (6t-bureau de recherche, 2022).
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7 Soit 4% des 900 000 déplacements quotidiens réalisés sur le PMGF (base 2015) (Schéma métropolitain des mobilités – septembre 2017).
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8 ATMB précise également avoir « grandement oeuvré pour l’adoption de l’article 40 bis de la LOM qui s’est directement inspiré des pratiques environnementales menées sur l’Autoroute Blanche (A40) présentées lors de plusieurs auditions au Sénat et à l’Assemblée nationale. Cette loi a inscrit dans le cahier des charges des nouveaux concessionnaires d’autoroutes l’obligation de « couvrir l’ensemble du réseau en points de recharge de batteries électriques, ou en hydrogène », mais aussi « en mettant en place des obligations chiffrées de construction de parkings de covoiturage et de voies réservées à ceux qui le pratiquent » et enfin, en imposant aux concessionnaires de « véritables tarifs sociaux et environnementaux » ».
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9 6t-bureau de recherche. (2020). Stratégie covoiturage du bassin lémanique avec zoom sur le Grand Genève. Rapport final.
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10 Rapport d’étude du CEREMA, 2021 : « Voie de covoiturage de Thônex – Vallard. Évaluation à 3 ans ».
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11 Défini dans le schéma comme du covoiturage passager, hors enfants et famille.
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12 Les trajets proposés sont à différencier des trajets réellement effectués : en effet, sur ces lignes, le conducteur reçoit une incitation même s’il ne transporte pas de passager, s’il propose ses sièges sur la ligne de covoiturage.
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13 Grassaud, op. cit.
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14 Dégrémont, 2019.
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15 Grassaud, op. cit.