Un fonds de participation des habitants axé sur la citoyenneté
L’exemple du Blanc-Mesnil
Irène GEGOUT, juin 2001
Profession Banlieue, Dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale (DPH)
Cette fiche a été rédigée à partir d’un entretien avec Patrick NORYNBERG, chef de projet contrat de ville du Blanc-Mesnil. Elle revient sur la démarche participative mise en place par la municipalité dès les années 1990.
Au Blanc-Mesnil, le souci d’encourager la participation des habitants a donné lieu à la création de plusieurs instances. Dès 1994, des groupes de travail thématiques réunissant institutions, élus et professionnels s’ouvrent aux habitants des quartiers nord de la ville. En pointant certaines difficultés rencontrées dans ces quartiers, ces groupes ont permis de faire remonter des besoins. La même année, la ville lance la Commission vie associative (le futur FPH) pour soutenir et favoriser les initiatives citoyennes et le développement du tissu associatif. Entre 1994 et 1999, cette commission a contribué à financer une centaine de projets associatifs concernant les quartiers nord et sud, pour un montant total de plus de 130 000 euros. En 1999, avec l’aide du Mouvement pour un développement social local, des Ateliers de l’Avenir sont organisés. Issues de ce moment privilégié, près de douze instances de travail et d’échanges impliquant des habitants et des professionnels de terrain (dont ceux des services publics) alimentent de leurs projets la programmation du contrat de ville 2000-2006.
L’enveloppe dédiée au soutien des initiatives associatives est gérée depuis 1994 par la Commission vie associative. Les changements survenus en 2000 ont donné naissance à un fonds de participation des habitants (FPH) : ce fonds a été ouvert aux projets des habitants des quartiers nord et sud non organisés en association, des thématiques prioritaires et un plafond financier ont été fixés (600 euros). Par ailleurs, les financeurs (Etat, Fonds d’action sociale, région, ville) ne siègent pas au sein de la commission, qui rassemble aujourd’hui responsables de services municipaux, du contrat de ville et associatifs.
Le FPH finance principalement les projets d’associations de proximité ou de collectifs d’habitants impliqués dans les instances de travail. Dans ce contexte, la souplesse du dispositif apparaît comme une condition essentielle de son efficacité : la commission est dorénavant réunie dès qu’une dizaine de projets peuvent lui être présentés (soit environ 3 ou 4 fois par an), les financements sont débloqués rapidement et contournent l’habituelle complexité administrative.
D’abord conçu comme un moyen parmi d’autres pour travailler à la citoyenneté, le FPH doit permettre de susciter le débat. Ainsi, lors des réunions de la commission, l’ensemble des porteurs de projet sont présents et peuvent participer à la discussion : au souci d’une ouverture démocratique s’ajoute celui de la rencontre, susceptible d’enclencher de nouveaux liens entre porteurs.
Les porteurs, avant de s’adresser à la commission, sont en contact étroit avec l’adjointe du chef de projet chargée d’assurer l’accompagnement des projets. Bien sûr, les besoins en accompagnement varient considérablement selon les porteurs : associations constituées, naissantes ou groupes d’habitants, collectifs habitués ou non aux circuits administratifs et au montage de projet, initiatives nécessitant une aide ponctuelle ou un accompagnement continu et pédagogique. Cette phase d’accompagnement permet d’explorer les différentes possibilités de financement et d’utiliser au maximum celles offertes par le droit commun. Elle incite de fait les institutions à considérer des projets issus d’une expression d’habitants.
Par ailleurs, les divers dispositifs de participation mis en place sur la ville, dont le FPH, doivent faciliter l’émergence d’initiatives d’habitants. Or il s’agit de faire en sorte que ces initiatives - et, plus largement, ce qui remonte de ces lieux de participation - soient prises en compte dans l’élaboration de l’action publique. L’intégration de projets coproduits avec des habitants dans les deux derniers contrats de ville du Blanc-Mesnil peut, déjà, être considérée comme une étape sur la voie de la transformation des pratiques institutionnelles.
Le FPH doit aussi jouer un rôle de levier. Ainsi, sur les quartiers nord de la ville, les actions montées chaque année pour la Journée nationale des quartiers ont en grande partie été financées par le FPH. Ces moments de fête se réitéreront en 2002 en co-pilotage avec le service municipal vie associative qui prend petit à petit le relais du contrat de ville. En créant des « précédents », des besoins qui appellent l’expression de nouvelles demandes, les démarches de participation conduisent la municipalité à s’adapter et à développer de nouveaux services pour y répondre.
Mais l’exercice de la citoyenneté s’avère d’autant plus aisé que l’on dispose de bagages sociaux et culturels. Or, le travail d’accompagnement des associations dans le cadre du FPH a révélé certains besoins en termes de formation (loi 1901, politique de la ville…). Initiées par le contrat de ville, des rencontres ont eu lieu en 1998 entre des associations des quartiers nord et sud de la ville et certaines institutions partenaires. L’année suivante, un stage animé par la Fédération des œuvres laïques (FOL) a été organisé en collaboration avec le service vie associative. Depuis, la ville passe chaque année une convention avec la FOL pour des cycles de formation ouverts à toutes les associations de la commune.
La prochaine étape consistera peut-être, dans une perspective de formation, à imaginer des temps d’échanges types « Université du citoyen » invitant un public plus large, notamment les habitants qui ne sont ni membres ni salariés d’associations.