Rester vivre et travailler sur le plateau du Vercors grâce au télétravail

Philippe JACQUOT, 2006

A trois quarts d’heure de Grenoble, les communes du Vercors attirent une population qui travaille dans la vallée tout en privilégiant son cadre de vie. Ce sont ces travailleurs pendulaires que vise la Communauté de communes du Vercors en créant un dispositif très développé d’accès aux TIC (technologies de l’information et de la communication)

Le télespace Vercors est dédié à l’accueil de télétravailleurs qui enrichissent l’activité et le tissu économique du plateau.

Parmi la population active qui habite le Massif du Vercors, environ un quart (1000 personnes) travaille dans la vallée, principalement à Grenoble. C’est pour éviter que ce site remarquable ne devienne un pays dortoir que la Communauté de communes du Massif du Vercors (anciennement District du plateau de Villard-de-Lans) a choisi de prendre le virage des nouvelles technologies.

Ouvert en 1996, le Télespace Vercors est un bâtiment de 500 m2, équipé et adapté au travail à distance, ou télétravail : des bureaux pré-câblés, un réseau Ethernet permettant la visioconférence, des services bureautiques comme la photocopie, le standard à distance, la gestion d’agenda et une ligne spécialisée.

Aujourd’hui, une cinquantaine de personnes y travaillent. Leurs profils et activités représentent bien la diversité des objectifs de ce Télespace. D’une part, maintenir des travailleurs de la vallée sur le plateau, ce qui est le cas d’une quinzaine de personnes dont l’activité (ingénieurs, chercheurs, assistants) ne nécessite pas une présence continue dans l’entreprise. Ainsi, le téléphone, l’ordinateur et le réseau informatique leur permettent de limiter leurs déplacements dans la vallée à un ou deux par semaine. Par exemple, l’un de ces télétravailleurs arrive du service recherche et développement d’EDF de Clamart (région parisienne). Ce type de télétravail s’adresse à des fonctions qui allient responsabilité et autonomie, et peut-être une certaine solitude dans les tâches à accomplir. D’autre part, diversifier les activités du Massif en accueillant des entreprises dédiées aux nouvelles technologies qui sont attirées par l’infrastructure mise en place, ou encore des plateaux de téléservices, comme ce plateau clientèle de Nouvelles Frontières.

Le choix de créer un lieu plutôt que d’équiper des logements vient de la réticence des entreprises vis-à-vis du télétravail. En effet, un lieu intermédiaire, entre le domicile et le site de l’entreprise, permet aux porteurs du projet de faire un pas vers les entreprises, et aux télétravailleurs de nouer de nouveaux liens de sociabilité dans le Télespace. Ils partagent en effet certaines équipements, comme la photocopieuse, et sont accompagnés par un permanent, qui anime le lieu pour faciliter le contact.

Par ailleurs, le Télespace se veut ouvert sur l’extérieur. Il propose la formation de la population à l’Internet dans le cadre, toujours, du projet de développement des TIC sur le territoire. Les réseaux buissonniers, créés en 1995, relient les écoles, les cyberpostes procurent un Email à tous les habitants, et les cyberpostiers ont été formés au Télespace… En choisissant le créneau des TIC, le Vercors mise sur le potentiel économique et humain du secteur : un secteur créateur d’emplois et de nouveaux métiers qui sauveront le pays de son destin de dortoir ou passades touristiques.

Argument supplémentaire pour convaincre les entreprises : la hausse de productivité des télétravailleurs. La baisse du stress quotidien, la diminution des sollicitations professionnelles produisent sans conteste un travail plus efficace.

Toutefois, le Télespace connaît des limites. Par exemple, il ne faut pas négliger le fait que, si le Télespace est bien équipé, l’entreprise doit aussi assurer l’équipement à l’autre bout de la chaîne, notamment en matière de débit et de sécurisation des transmissions. De plus, faire le pas de laisser partir complètement leur salarié n’est pas si facile pour les partenaires. Cela signifie recycler le bureau que l’ingénieur utilisait éventuellement dans la vallée et s’organiser autrement pour l’accueillir lors de ses déplacements. Toutes les entreprises ne sont pas encore prêtes à fournir ces efforts.

Aujourd’hui, 57 pour cent des foyers du Massif du Vercors sont connectés à Internet, c’est-à-dire deux fois plus que la moyenne française. Pourtant, et alors qu’est testé à Autrans la technologie du Wireless Fidelity, qui abolit le câble pour une transmission aérienne, la région souffre d’un manque d’intérêt des opérateurs, qui ne souhaitent pas investir dans l’installation d’un réseau à haut-débit, faute, selon eux, de rentabilité. Or cette infrastructure est essentielle pour le Télespace et sa capacité de communication en volume. Heureusement, la Communauté de communes soutient toujours le Télespace et souhaite même essaimer son expérience, encourageant à la création de mini-télespaces dans les villages, sous la forme d’un espace réservé dans les mairies, les bâtiments communaux, etc.

Le projet de dynamisation de l’économie du Massif du Vercors via une orientation vers les TIC frappe par la complémentarité de ses différentes branches. En même temps que le Télespace est la vitrine économique et entrepreneuriale du projet, le réseau buissonnier et la cyberposte concernent l’ensemble de la population. Dès la maternelle, les enfants du Vercors sont rompus à l’informatique et s’approprient les moyens modernes de communication. Une façon de laisser imaginer à ces jeunes un autre projet que le départ inéluctable du pays après leurs études…

Referencias

  • Cette fiche a été réalisée lors des Entretiens internationaux de la Délégation à l’Aménagement du territoire et à l’Action Régionale (DATAR), à Paris, du 28 au 30 janvier 2002.

  • Entretien avec Chantal CARLIOZ, Directrice du Télespace.

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