Stuttgart, un exemple ?
Katia Buoro, Xavier Desjardins, 2012
La région de Stuttgart a connu des enjeux urbains importants dans les années 1990. L’ensemble de la région est alors touché par un déclin économique que la réunification des la RFA et la RDA a accentué. Ce déclin a été particulièrement net dans la ville centre de Stuttgart qui perd peu à peu de sa vitalité. La région devient donc de moins en moins attractive et perd des places dans les classements des villes allemandes. Cette situation économique a pour conséquence de rendre plus difficile le financement d’investissements publics. Ces problèmes fiscaux ont été les révélateurs de la nécessité de rénover le cadre institutionnel de cette ville. En effet, la ville ne connaissait pas avant 1994 d’autorité planificatrice efficace puisque deux autorités en étaient chargées, sans véritable pouvoir d’impulsion. Le renforcement de la coopération intercommunale et de la planification à l’échelle de l’agglomération est alors une nécessité pour la ville.
Un débat a donc eu lieu à Stuttgart entre les différents acteurs, locaux, régionaux et nationaux afin de trouver une organisation permettant de répondre à ces enjeux forts de l’agglomération. Trois solutions institutionnelles ont été envisagées pour cela.
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La première consistait en une réforme de l’organisation des institutions locales afin de créer une nouvelle institution qui se substituerait partiellement voire totalement à l’ensemble des institutions existantes. Cela pouvait se concrétiser par une fusion de la ville-centre avec les communes périphériques, ou par la création d’un Kreis régional. Cette solution a longtemps été suivie en Allemagne pour adapter les structures aux rythmes de l’urbanisation. Or l’explosion démographique urbaine a eu lieu tôt en Allemagne, dès la fin du 19ème siècle. Pour permettre à l’industrie de s’y développer, des fusions communales ont été réalisées. Dans les médias français, l’Allemagne est alors vue comme un modèle de réussite de ce volontarisme réformateur.
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La deuxième proposition institutionnelle qui a émergé du débat local consistait en un statu quo politique. Cet immobilisme politique était promu par des représentants locaux qui auraient été menacés dans leur mandat par la création d’une nouvelle institution. L’argument du respect de la différence entre les différents espaces de l’agglomération a été avancé, mais Vincent Hoffmann-Martinot souligne dans son étude qu’une motivation forte était en réalité la volonté d’échapper au transfert des charges financières de la ville-centre vers les petites communes ou les espaces périphériques pour le financement d’équipements d’envergure régionale.
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La dernière solution, qui a été retenue, consiste à privilégier l’innovation pragmatique qui naît de la situation locale. L’alliance qui eut lieu entre la CDU et le SPD a permis de voter, en 1994, la loi sur le renforcement de la coopération dans la région de Stuttgart. Le Verband Region Stuttgart a ainsi été créé. Il se caractérise par plusieurs originalités dans la planification des grandes villes.
Cette institution est issue d’élections directes. Ces dernières ont lieu selon le même système personnalisé que les élections locales. Cela permet d’assurer une réelle légitimité démocratique à cette institution. Certaines critiques ont alors été formulées sur le risque de compétition avec entre cette région et le Land.
Le périmètre large de sa zone territoriale permet une appréhension efficace de la planification de la région urbaine, puisqu’il comprend 179 communes.
Le champ de compétences de la région est large. La région reprend les compétences des deux anciennes institutions planificatrices : elle est ainsi en charge de la planification régionale (i.e. axe de développement industriel, commerces, services, logement, des transports régionaux, de la gestion et du traitement des déchets, du développement économique et touristique de la région…. ). Une innovation importante lui permet de surmonter l’opposition d’une ou plusieurs communes car elle peut décider de l’obligation pour ces communes de mettre en compatibilité leur règlement d’urbanisme avec les orientations de planification qu’elle a choisies.
Mais cette innovation pragmatique a suscité des critiques des deux côtés. Le risque de bureaucratisation avec la superposition de ce nouvel échelon politico-administratif a été souligné alors que d’autres ont regretté un manque de courage qui aurait pu favoriser une régionalisation plus poussée.
Cependant ce prototype de nouvelle génération de gouvernement métropolitain a plus d’un intérêt pour les gouvernances des métropoles de l’Europe. Son pragmatisme dans la concertation de la solution, le renforcement de sa légitimité démocratique permettant l’émancipation du gouvernement métropolitain des intérêts locaux. C’est pourquoi cet exemple, près de 20 ans après sa mise en œuvre, est encore cité comme une « bonne pratique » dans les cercles d’aménageurs.
Sources
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Vincent Hoffmann-Martinot, « la relance du « gouvernement métropolitain » en Europe – Le prototype de Stuttgart », Revue Française d’administration publique, n°71, juillet-septembre 1994.
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Martin Vanier, « La région métropolitaine de Stuttgart, un exemple à méditer », in Territoires et projets, les outils de la gouvernance, Document introductif au 32ème rencontre nationale des agences d’urbanisme, Technicités, Supplément au numéro 214 du 8 septembre.