Un logement de transit et d’insertion prioritairement pour les stagiaires d’une Entreprise de Formation par le Travail (EFT)
L’association La Maison
Pascale Thys, septiembre 2001
Cette fiche présente l’asbl La Maison, Association de Promotion du Logement, qui propose des logements de transit et d’insertion, assortis d’un accompagnement social. Une multitude de structures gravitent autour de cette asbl, permettant de compléter l’offre aux personnes en difficulté, notamment en termes de formation.
Cette fiche a été réalisée avec le concours de La Maison asbl, et à partir de l’interview de 4 personnes : 2 locataires, la coordinatrice et le responsable de la gestion.
Contexte et origines du projet
La Maison asbl a été fondée en mars 2001 (M.B.22/03/01) suite à la nécessité d’officialiser la distinction entre l’activité d’EFT du Cortil et l’offre de logement d’insertion ou de transit qui a été développée pour répondre à un besoin de logements des stagiaires.
Le Cortil, quand à lui, a été créé en 1985 par la maison des enfants « Le Relais » de Neuville-en-Condroz qui fait partie de la Maison Heureuse asbl. A l’époque, l’équipe éducative souhaitait trouver une solution au décrochage scolaire des jeunes placés. La plupart, quittant l’école sans diplôme, trouvaient difficilement un emploi dans le contexte économique de crise. D’abord agréé en 1987 comme entreprise d’apprentissage professionnel (E.A.P.), le Cortil est agréé comme entreprise de formation par le travail (E.F.T.) depuis 1996 par la Région wallonne.
Le premier locataire de La Maison est entré en juin 1994 dans son logement. Une autre maison a été rénovée et inaugurée en collaboration avec le CPAS (centre public d’action sociale) de Seraing en octobre 1997.
Objectifs et enjeux du projet
L’asbl « La Maison » a été créée pour gérer de nouvelles opérations de rénovation de bâtiments insalubres, les entretiens et l’accompagnement social des locataires.
L’objectif est de développer la capacité des « bénéficiaires » à gérer leur logement et à l’entretenir ou retrouver un logement accompagné d’un suivi.
C’est offrir une solution de logement temporaire aux jeunes en grande difficulté de logement et prioritairement pour ceux qui sont en formation au Cortil.
Concrètement, il s’agit d’apprendre à équilibrer un budget, mettre en ordre une situation administrative, apprendre à évoluer dans certaines difficultés de vie et, en termes de contrat, c’est apprendre à occuper et gérer un logement ordinaire.
C’est encore offrir un lieu où se stabiliser, voir venir les choses, relancer un projet en ayant plus confiance en soi-même.
Population concernée et groupes cibles
Ce sont des allocataires sociaux à très bas revenus, le plus souvent sans qualification. Il s’agit surtout de personnes isolées, un logement permet d’accueillir une famille avec un enfant. Souvent, les bénéficiaires présentent des problèmes d’endettement.
Les conditions d’accès sont d’être âgé de 17 à 30 ans, d’être sans logement ou dans un logement précaire, et d’accepter le contrat social (accompagnement). Une priorité est donnée aux stagiaires en formation du Cortil. La maison de Seraing s’adresse à un couple ou à une personne avec enfant originaire de Seraing et en difficulté de logement.
Montage financier
Le loyer s’élève à 20% du revenu (soit 4267 FB pour un minimexé isolé, en 2001), plus les charges (forfait de 500 FB pour l’eau, compteur d’électricité individuel pour certains appartements) et le gaz.
Chaque locataire doit constituer une caution en versant 1000 FB par mois sur un compte qui sera bloqué lorsque la caution (équivalente à un mois de loyer) sera constituée.
Au niveau des bâtiments, dans un cas, il s’agit de l’acquisition d’une maison insalubre par donation privée. La Région wallonne est intervenue dans le cadre de la rénovation du bâtiment par un subside de 700 000 FB.
Une collaboration avec le CPAS de Seraing a été menée pour la rénovation d’une maison dont le CPAS est propriétaire.
Partenaires du projet
Une collaboration étroite existe entre La Maison et le Cortil, l’asbl dont elle est issue. Dans la sélection des locataires, une priorité est donnée aux stagiaires en formation du Cortil. Par ailleurs, La Maison travaille en partenariat avec un réseau associatif important dont le Groupe d’action pour le droit au logement, le Projet de Santé Communautaire à Seraing ou Habitat-Service.
Déroulement du projet
L’asbl a deux activités principales : d’une part, le suivi social, d’autres part, la maintenance des bâtiments et la recherche de nouveaux chantiers et bâtiments.
Les personnes ont connaissance du projet essentiellement par le bouche à oreille. Les personnes intéressées, qui sont à la rue, dans un centre d’hébergement ou en prison, etc., téléphonent ou passent à La Maison pour avoir plus d’informations. Le projet est alors expliqué et l’accent est mis sur la spécificité du contrat qui n’est pas un bail, mais un contrat d’accompagnement social dont il faut accepter la contrainte du suivi social. L’assistante sociale vérifie que la personne rentre bien dans les conditions d’accès définies par l’arrêté. Suite à cet entretien, la personne doit recontacter La Maison si elle reste intéressée par le service proposé.
Une fois qu’un logement est disponible, il est proposé à la personne. Pour les studios, la durée du contrat est de 6 mois renouvelables deux fois. Dans le cadre de l’accompagnement, les rencontres ont lieu en moyenne une fois par semaine. Des réunions de locataires ont lieu régulièrement et si possible une fois par mois.
Perception du projet par les acteurs
Résultats quantitatifs
En 1999, 11 personnes ont bénéficié d’un appartement supervisé. Parmi elles, 3 ont trouvé un logement privé, 4 ont prolongé leur bail en 2000, 2 personnes ont quitté pour une destination inconnue, 1 personne a été expulsée, 1 personne est retournée dans un établissement de défense sociale. En 2000, une quinzaine de personnes a bénéficié du service. Parmi elles, 6 personnes ont bénéficié d’un appartement supervisé, 1 ménage avec enfant prolonge son bail en 2001 et 1 personne, venant d’avoir un enfant bénéficie d’un autre logement de transit plus grand, au Cortil.
La maison du Seraing a été occupée par une jeune femme et sa fille. Le contrat a été prolongé en 2000.
En 2000, trois ménages ont bénéficié du logement. 1 ménage a retrouvé un logement privé, une femme et son enfant sont accueillis dans un logement pour femmes battues, un ménage constitué d’un couple avec enfant prolonge en 2001.
Actuellement, La Maison dispose donc de deux immeubles à Ougrée, l’un composé de quatre studios meublés et d’un local de permanences sociales, l’autre composé de trois studios dont un sera achevé au cours de l’été 2001 ainsi que d’une maison unifamiliale à Seraing.
Résultats qualitatifs
Il s’agit d’une réponse intéressante à une problématique de terrain en termes de logement de personnes désirant entamer une formation mais confrontées à un problème de logement.
« Ils aident les jeunes à se débrouiller dans la vie, à remplir des papiers et à chercher un logement », explique un locataire. L’accompagnement paraît être à la hauteur des attentes des gens : « Ici, on est libre, mais au cas où, il y a possibilité de parler. L’appartement permet de se débrouiller, se retrouver soi-même. On a sa porte, sa clef, on est chez soi. »
Efficacité du projet
Deux témoignages tendent à montrer l’efficacité du projet. L’un, d’un locataire : « je me sens responsable ici », l’autre, d’un travailleur : « au bout de 6 mois avec Habitat-Service ils s’envolent, c’est la réussite ».
La participation
La participation des locataires au projet est relativement réduite. Elle a toutefois été développée dans le partenariat avec le Cortil. En effet, dans certains cas, les rénovations faites par le Cortil ont été et sont encore faites par et pour les personnes en difficulté.
La dimension collective n’est pas présente dans le projet.
Avancées au niveau du droit
Mise à part le respect de droits élémentaires, on ne note pas de particularités du projet en termes de droits.
Le projet comme processus
Le projet est clairement identifié comme une étape pour les personnes en difficulté. Cependant, les locataires exprimaient qu’il est difficile parfois d’envisager de quitter le logement parce qu’il leur serait impossible de trouver un appartement de cette qualité au prix qu’ils payent.
Difficultés rencontrées, blocages et handicaps
Au niveau des locataires :
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Les dettes énergétiques des bénéficiaires rendent parfois impossible l’ouverture de compteurs gaz/électricité. Cette situation nécessite d’améliorer le partenariat avec la cellule énergétique du CPAS afin de pouvoir faire face à de tels problèmes.
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La demande étant plus importante que l’offre, une liste d’attente est mise au point.
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Il y a des difficultés relatives à la caution locative qui est difficile à réunir et qui est difficile à obtenir auprès du CPAS.
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L’accès au logement social est très difficile.
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La situation environnementale de la région (usines abandonnées, pauvreté, peu de services de proximité, …) n’est pas très agréable et il y a régulièrement de la violence dans le quartier.
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Un locataire dit : « Quand on n’a pas de toit on n’a pas de droit !»
Au niveau du service :
Selon l’arrêté sur le logement d’insertion ou de transit, il faut employer deux personnes à temps plein pour avoir droit à un subside de fonctionnement, or la Maison n’atteint pas ce niveau.
Des interrogations planent quand à la possibilité de continuer à pouvoir travailler avec le Cortil pour les rénovations vu la nouvelle loi sur les marchés publics. Pour La Maison, l’introduction d’un aspect social dans la rénovation est un aspect important du projet. Le service sera tenu de soumissionner le projet à trois services. Pour eux, il est bon d’être maître d’œuvre et de faire un accompagnement social.
Atouts du projet et causes de réussite
Pour les travailleurs, un avantage majeur du projet est de permettre de faire un accompagnement des personnes dans leur milieu de vie réel et non dans un service d’hébergement. « La personne vit là, se nourrit, va en formation la journée, peut avoir des loisirs, … Elle doit aussi gérer son budget», explique un travailleur.
Un autre aspect qui peut être vu comme un atout du projet est la proximité entre le service de logement d’insertion et l’EFT. On constate là aussi que la création vient d’un besoin émergeant du terrain.
Perspectives de développements futurs du projet
Des négociations sont en cours auprès des C.P.A.S. (Seraing, Neupré et Liège), des communes, des propriétaires privés, … pour la mise à disposition de logements insalubres (dons ou contrats de bail) dans le cadre de l’opération « Logement de transit et d’insertion » (réaffectation de l’immeuble avec l’aide la Région wallonne et de la formation « rénovation en bâtiment » du Cortil).
Deux chantiers sont toujours en cours, l’un à Ougrée (convention avec un propriétaire privé), et l’autre à Seraing. D’autres dossiers sont en attente dont à Seraing (CPAS) et à Grivegnée.