Tremblay-en-France se mobilise pour maîtriser son développement
Ina Ranson, noviembre 2000
Cette fiche démontre comment, face aux menaces d’une expansion anarchique, la ville de Tremblay-en-France a pris les devants pour que l’insertion de l’aéroport dans son environnement respecte ses paysages, ses traditions et la qualité de vie des habitants.
Tremblay-en-France (32 000 habitants) est la ville de Seine-Saint-Denis la plus vaste : de ses 2 200 hectares, un tiers est constitué de terres agricoles situées entre l’aéroport Charles de Gaulle et l’agglomération parisienne. Avec les projets d’extension de l’aéroport et de l’agrandissement du Parc des Expositions de Paris Nord II, la ville se trouve au cœur d’une forte pression foncière.
Face aux risques d’un fractionnement sans âme, Tremblay a décidé de prendre en main sa propre destinée. Tout en s’ouvrant aux possibilités d’emplois offertes par les nouvelles zones d’activité prévues sur un tiers de son territoire, la Ville a opté pour un projet d’ensemble qui s’inscrit dans la logique d’un développement durable : il intègre les entreprises avec leurs infrastructures, mais aussi la ruralité, le respect de l’environnement et des besoins culturels et sociaux de ses habitants.
La ville a donc organisé, au début des années 90 un programme d’enquête et de rencontres avec les habitants et lancé, en 1993, avec l’aide de l’A.F.T.R.P. (Agence Foncière et Technique de la Région Parisienne), un appel international d’idées sur l’aménagement de son secteur. Le projet retenu est celui d’un urbaniste italien, Massiliano Fuksas. En créant sa propre structure d’aménagement, le SAGE (société d’économie mixte radiée en 2005), la Ville entend participer aux travaux en cours. A noter que le projet Tremblay 1995-2001 a été approuvé dans les « ateliers du citoyen » qui ont précédé le renouvellement de l’équipe municipale.
Inscrire la modernité en respectant l’histoire et le caractère de la ville
Tremblay fut d’abord un village. Au début du 20° siècle, au cours de l’industrialisation de la région parisienne, les ouvriers viennent y construire leurs maisonnettes, d’abord le long de la voie ferrée et du canal de l’Ourcq : Vert Galant et Bois St Denis, plus tard Le Cottage. Dans les années 60, s’y ajoutent des constructions monotones, « le Grand-Ensemble », sur 138 ha - mais leur progression est arrêtée grâce à la contestation des habitants et des élus qui réussissent aussi à sauver une grande partie des bois. Aujourd’hui, il y a encore 70 hectares de bois en pleine ville ! Avec 700 ha de quartiers pavillonnaires et d’habitat collectif et encore 700 ha de terres agricoles, Tremblay a un physique très particulier que le projet d’ensemble doit mettre en valeur en donnant une unité aux éléments si différents.
Le projet de M. Fuksas va tout à fait dans ce sens: il donne un côté paysager fort aux aménagements prévus et il préconise en particulier la mise en valeur et la revitalisation du vieux village. Isolé par une voie rapide, celui-ci a été préservé comme une enclave au milieu de plaines agricoles. Il s’agit d’empêcher qu’il soit marginalisé ou englobé dans une urbanisation non maîtrisée.
Conformément aux désirs des délégués municipaux et des habitants, les espaces agricoles seront conservés au sud et à l’est. Et « Le Vieux Pays » est réhabilité avec beaucoup de respect pour son patrimoine rural et culturel. Son église est classée monument historique, ainsi qu’une très belle grange aux dîmes. Une partie de l’habitat rural est réhabilitée. Neuf architectes français et étrangers ont proposé des plans de constructions modernes, de dimension modeste, pour remplacer les immeubles sans intérêt patrimonial et pour utiliser les friches. Ce qui importe, c’est de mêler tradition et modernité d’une façon ajustée et audacieuse et de consommer très peu d’espaces.
Sont prévus aussi des locaux associatifs et des immeubles pour l’accueil d’activités économiques. Les bâtiments d’un Institut Universitaire Technologique (IUT) au sud du village, ont été terminés en 1996. Ce « Vieux Pays » attire déjà de nouveaux habitants et des visiteurs, sans parler des clients des nombreux nouveaux restaurants qui s’y installent. La première phase de construction des lotissements est en cours, après une étude qu’a commandée la ville pour identifier les besoins spécifiques des actifs du pôle de Roissy.
Le Vieux Pays sera entouré d’un parc boisé de 250 hectares, en synergie avec le projet de ceinture verte du Conseil Régional de l’Ile-de-France. Ce « Ring » constituera un élément fédérateur qui permettra d’intégrer dans un ensemble paysager cohérent les infrastructures de desserte, sans oublier les promeneurs et les cyclistes. Il sera prolongé par un parc dans la vallée du Sausset, limitrophe de la commune de Villepinte.
Ne pas négliger les liaisons douces
L’aéroport de Roissy constitue un formidable noyau d’interconnexion entre l’avion, le TGV, le réseau express régional (RER) et la route. Il est particulièrement important que les infrastructures lourdes ne gâchent pas le paysage et laissent de la place pour les liaisons douces. La Ville de Tremblay s’y engage fortement : des voies séparées pour les vélos longent déjà le canal et sont actuellement réalisées, par petits morceaux, dans la ville. Un Plan Vert élaboré par la Ville, l’I.A.U.R.I.F. et le Syndicat intercommunal dessine un réseau de voies cyclables cohérent (bandes et pistes cyclables, zones 30) irriguant tous les quartiers, les reliant entre eux et permettant d’atteindre les espaces naturels proches ainsi que les réseaux cyclables des villes voisines.
A l’intérieur du Vieux Pays la circulation automobile sera limitée, grâce à la déviation prévue entre la R.D. 40 et le boulevard périphérique sud de l’aéroport, complétée par une voie de contournement.
Un grand « boulevard écologique » reliera les quartiers d’activité de Paris Nord II, en passant par la future Zone des Activités Internationales au futur lac dans le sud du parc de Tremblay. Les riverains participent au projet, et, par exemple EDF vient d’installer un nouveau transformateur et à la demande de la Ville l’entoure maintenant d’un rideau de végétation.
Pour aider ses habitants à trouver du travail autour de Roissy, la ville a conçu, avec le Conseil Général du Val d’Oise, un service de bus sur commande qui fonctionne 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Il suffit de téléphoner au bureau d’Allobus, une heure avant le départ, puis de présenter un titre de transport habituel. Actuellement ce service essentiel pour une population en général assez modeste s’autofinance à 30 pour cent.
Cultiver le partenariat
La répartition des compétences et des responsabilités de financement nécessite une concertation continuelle entre l’État, la Région, le Département, les Communes voisines et Aéroport de Paris. Un comité de pilotage qui comporte l’ensemble des partenaires et qui est présidé par le Préfet et le Directeur Régional de l’Équipement de la Région suit l’exécution des contrats. « Obtenir l’accord sur les objectifs généraux du développement durable est une chose, souligne Jacques Grangé, Directeur de l’Aménagement de Tremblay, mais quand il s’agit de passer à l’acte, il faut vaincre beaucoup d’obstacles ! »
Parmi d’autres réalisations intéressantes de la Ville de Tremblay, il faut citer en particulier l’utilisation de l’énergie géothermique….
Pour coordonner l’équipement et le développement sur les communes de Tremblay, Villepinte, Sevran, Aulnay-sous-Bois et le Blanc Mesnil, un syndicat intercommunal a été constitué.
Para ir más allá
Scherrer Franck. 1991. L’Agence foncière et technique de la région parisienne. De la planification à l’urbanisme opérationnel, In: Les Annales de la recherche urbaine, N°51, « La planification et ses doubles ». pp. 71-81.
Le 5 août 2015, l’Agence foncière et technique de la région parisienne (AFTRP) est devenue Grand Paris Aménagement.
Site de la ville de Tremblay-en-France
Opération Aérolians, Tremblay-en-France
Les ateliers du citoyen à Tremblay
Site de l’architecte Massiliano Fuksas
IAU (Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Ile-de-France)
Informations sur Allobus
Utilisation de l’énergie géothermique : La géothermie prend racine à Tremblay