Rénover des logements inoccupés avec « Sans-Abri Castors »
Appliquer la loi de réquisition des bâtiments vides
Pascale Thys, 2009
Contexte et origine du projet
Le projet s’inscrit dans le combat pour une société plus solidaire, nous dit un des responsables du projet.
L’association a été crée en 1995. Elle répond à la non-application de la loi qui légifère la réquisition de bâtiments inoccupés pour reloger les sans-abri. Pour les responsables du projet, outre qu’elle est peu (ou pas) appliquée, les sans-abri n’ont pas seulement besoin d’être relogés mais aussi de trouver une adresse pour percevoir un revenu, recréer des liens sociaux, faire la démonstration qu‘ils sont capables de travailler. Ils ont également besoin de se revaloriser eux-mêmes et d’en faire preuve par rapport aux autres citoyens. Il y a aussi besoin d’offrir du logement de qualité correcte à un prix abordable.
Objectifs
Il s’agit de démontrer aux principaux responsables politiques la faisabilité de l’affectation de bâtiments inoccupés au relogement de sans-abri. Les autres objectifs sont de resocialiser les sans-abri en les intégrant dans une équipe de travail, de valoriser la capacité des sans-abri à se reprendre en main et de donner accès à un logement correct et à loyer très modéré pour ceux qui adhérent au projet.
Aux dires d’un responsable :
l’enjeu du projet est de taille, les difficultés sont énormes et le projet requiert une conviction et un engagement mais le projet est sans doute difficilement reproductible sans un encadrement important et de qualité.
Population concernée
Sans-Abri Castors cible essentiellement les sans-abri et les expulsés. Les sans-abri sont souvent célibataires, âgés de 30 à 40 ans parfois plus jeunes. Parmi les expulsés, il y a aussi des familles avec enfants.
En ce qui concerne les conditions d’accès, il est important que le candidat montre une volonté minimale de travailler en équipe, dans le bâtiment en rénovation, de manière régulière sauf en cas de maladie. Malgré une certaine tolérance, faute d’un minimum d’assiduité ou faute de difficultés importantes au niveau du travail d’équipe, la personne peut être exclue. Les responsables du projet estiment qu’il faut beaucoup de souplesse mais qu’il ne faut pas tomber dans l’assistanat.
Montage financier
Le Ministère des Affaires sociales et de la Santé de la Région wallonne subventionne le service en permettant l’engagement d’un travailleur social. Il y a deux emplois dans le cadre « Rosetta » et trois PTP. Le CPAS a permis d’accueillir deux personnes sous Article 60. Diverses entreprises fournissent des matériaux pour les rénovations. Plusieurs fois, la Fondation Roi Baudouin a subventionné le projet dans le cadre de la lutte contre l’exclusion. Un fois, il s’agissait d’une aide pour la construction d’une salle d’animation pour intégrer les participants.
Partenaires du projet
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Solidarités Nouvelles
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Comme chez nous
Au point de départ, le projet a été lancé en collaboration avec la maison d’accueil « L’Ilot », le FOREM de Charleroi (qui a détaché des éducateurs pour sensibiliser les sans-abri à ses formations), la FUNOC et le CPAS.
Déroulement du projet
Plusieurs étapes marquent l’engagement des personnes dans le projet. La première étape consiste en une prise de contact avec le travailleur social. Celui-ci fait une évaluation de la situation des candidats et présente la candidature au Conseil d’Administration de Sans-Abri Castors.
S’il est accepté, le candidat effectue un stage de trois semaines durant lesquelles il est rémunéré comme ALE pour tester sa volonté à participer au projet et pour qu’il rencontre l’équipe. La troisième étape consiste à signer un contrat de bail à rénovation et au relogement dans un logement provisoire gratuit excepté les charges de chauffage et d’électricité (1500 FB/mois). Enfin, après 9 à 12 mois de travail non rémunéré, l’usager a un logement correct dont il doit payer un loyer qui s’élève à 20% ses revenus pour un période indéterminée.
Dès l’accès au logement provisoire et grâce à l’accompagnement social, les participants retrouvent une adresse et aussi la possibilité de percevoir une allocation (chômage, minimex, pension ou d’invalidité).
Résultats
Depuis 1995, une vingtaine de logements a été rénovée. Actuellement, à Charleroi, l’association travaille dans une maison qui offrira trois logements dont deux sont déjà finis et occupés, et trois autres logements sont en cours de construction. En moyenne, il y avait 5 à 6 sans-abri sur le chantier, mais l’absence de perspectives de rénovation destinées à leur logement a diminué leur nombre. En outre, 3 locataires ont retrouvé un emploi. Pour les participants, des sans-abri moins déstructurés, qui « tiennent le coup », cela donne de bons résultats : relogement correct, resocialisation, certains retrouvent du travail, certains apprennent à payer régulièrement leur loyer et à entretenir leur logement.
Le projet est excellent, déclare un sans-abri ravi d’avoir un logement après avoir travaillé sur les chantiers de Sans-abri Castors.
En terme de resocialisation, les responsables ne se donnent pas d’obligations de résultats pour tous les participants. « Plus de la moitié de ceux qui s’engagent au point de départ abandonnent. » nous explique un responsable. Certains même « profitent » de l’association pour se reloger un temps sans même payer les charges tel que le chauffage de leur logement provisoire.
La mobilisation et la participation des sans-abri passent de manière très concrète par la participation à la rénovation d’immeubles destinés au relogement des participants ou à la rénovation d’un bâtiment destiné à un centre d’accueil de jour pour sans-abri.
L’association milite pour le droit au logement. Dans ce cadre, avec d’autres associations, Sans-Abri Castors demande le droit pour les chômeurs à entretenir et rénover leur logement sans pénalisation sur le montant des allocations. Il s’agirait d’un pas vers le droit à l’autorénovation pour les plus démunis.
Difficultés rencontrées
Les responsables du projet expliquent que les sans-abri ne sont pas des «petits saints ». Ils sont souvent prisonniers d’assuétudes amplifiées par leurs échecs et leurs conditions d’existence.
Le chantier connaît des problèmes d’inégalités au travail, de boisson, de drogues, de violence. Parmi ceux qui entrent dans le projet, un certain nombre ne « tiennent pas le coup ». L’accompagnement social est particulièrement déroutant, difficile. Selon les dires du responsable, la gestion du projet et la responsabilité du Conseil d’Administration sont tout aussi déroutants et difficiles. De part et d’autre il faut être particulièrement solide pour « tenir ». Pour l’observateur extérieur, la pédagogie de l’instructeur est souvent déroutante et donc sans doute difficilement reproductible.
Le projet étant, selon les dires de la Région wallonne, « hors normes », explique le responsable de Sans-Abri Castor, après avoir fait l’objet de subventions dans le cadre du budget « logement d’insertion », l’association est aujourd’hui exclue de ce soutien financier. Pour avoir accès aux aides, il faudrait devenir une « entreprise ».
Or, explique le responsable, la déstructuration des participants ne peut assurer la rentabilité nécessaire à ce statut. Il faut donc « mendier » auprès des sponsors privés. Cette insécurité financière accentue le « stress » des responsables ».
To go further
Cette fiche a été réalisé à partir de la rencontre de deux bénévoles, deux compagnons et le président de l’ASBL Sans-abris Castors.
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Siège social
Rue Léopold 36 (à partir de septembre 2001)
6000 Charleroi
Tél. : 0476 38 09 24 (provisoirement)
Fax. : 071 34 58 15