Stratégie et actions en Chine face au changement climatique
2013
Cette fiche concerne la Chine et son engagement dans la lutte contre le changement climatique. La Chine est devenue en 2010 le premier émetteur au monde de gaz à effet de serre et, en matière de transports, le nombre d’automobiles y est passé de 1 million en 1990 à 61 millions en 2010. Son action dans ce domaine est donc cruciale.
I. La Chine et le changement climatique
La Chine, premier émetteur mondial de CO2 depuis 2010
Récemment devenue la deuxième puissance économique mondiale et le premier consommateur d’énergie, la Chine détient également le triste record de premier émetteur de CO2 : plus de 6,5 milliards de tonnes, soit 22,30 % du total mondial. La même année, les États- Unis et l’Union européenne à 27 représentaient respectivement 19,91 % et 14,04 % du total, suivis de l’Inde avec 5,50 %.
En sa qualité de principal contributeur mondial au problème du changement climatique, la Chine a été la cible de l’attention internationale quant au rôle qu’elle a joué à la Conférence de Copenhague (2009) dans les négociations de l’après-Kyoto. En effet, les autorités chinoises ont refusé toute réduction contraignante, non seulement pour leur pays, mais aussi pour l’ensemble des pays développés. Suite aux multiples critiques internationales, et tout en esquivant toute contrainte, la Chine a fait preuve de flexibilité lors de la conférence de Cancun en 2010. Elle a adopté plusieurs initiatives visant à informer le reste du monde de ce qu’elle est en train de faire pour réduire ses émissions et accepté de se soumettre à un mécanisme de mesure, report et contrôle, spécifique aux pays en voie de développement, (International Consultation and Analysis, proposé par l’Inde).
Le plan quinquennal 2006-2010
L’initiative de transparence adoptée par la Chine au cours de l’année 2010 lui a sûrement été utile pour faire la preuve de ses efforts dans le cadre du XIe plan quinquennal (2006-2010), notamment en matière d’énergies renouvelables (solaire, éolien et hydraulique) et pour économiser l’énergie. Par exemple, selon une étude du Pew Charitable Trusts, dont les résultats ont été communiqués fin mars 2011, la Chine a injecté en 2010 54,4 milliards de dollars dans les énergies renouvelables et d’autres projets « verts », en augmentant de 39 % ses investissements par rapport à 2009. Dans le même temps, l’Allemagne a engagé 41 milliards de dollars, tandis que le « grand absent de Kyoto », à savoir les États-Unis, investissaient 34 milliards de dollars.
Ce « virage vert » de la Chine semble avoir deux raisons principales
Tout d’abord, l’une de ses premières préoccupations est sa sécurité énergétique, véritable fondement de la politique contre le changement climatique adoptée en 2007. Avec l’exceptionnelle croissance économique depuis les années 1980 la consommation énergétique a connu un accroissement annuel moyen de 5,3 %. A l’époque de Deng Xiaoping, la Chine avait adopté une stratégie de réduction de son impact énergétique, qui visait à quadrupler le PIB de 1980 à 2000 sans augmenter proportionnellement la consommation d’énergie qui devait seulement doubler. À la fin de la période programmée, la Chine non seulement avait atteint son but, mais l’avait dépassé, établissant ainsi un record mondial : elle s’illustrait comme le premier pays en voie de développement à enregistrer une croissance économique phénoménale sans connaître une augmentation proportionnelle de sa consommation d’énergie.
Malheureusement, cette tendance ne s’est pas confirmée pendant la période 2001-2006 qui a vu une croissance annuelle du PIB de 10 % et une augmentation de la consommation énergétique d’environ 11,4 % par an. Cette inversion de tendance s’explique par la croissance rapide des exportations (entrée dans l’Organisation Mondiale du Commerce), une urbanisation rapide qui a fait croître la demande d’acier et de béton, l’amélioration générale des conditions de vie de la population et, parallèlement, une réduction de l’attention portée par le gouvernement à la question de l’efficacité énergétique. Toutefois, les fréquentes pénuries d’énergie enregistrées au cours de cette période et la hausse du prix du pétrole en 2004 ont conduit le gouvernement central à repenser sa stratégie de production et à revenir à des objectifs d’économie énergétique. C’est ainsi que, dans le cadre du XIe plan quinquennal, la Chine s’était fixé le but de réduire sa consommation d’énergie de 20 % entre 2006 et 2010 et d’augmenter de 15 % sa production d’énergies renouvelables avant 2020. Ces objectifs, qui ont été atteints au cours de la période considérée, répondaient justement au souci de garantir la sécurité énergétique, point fondamental pour maintenir la tendance qui a permis l’amélioration progressive des conditions de vie de la population chinoise.
La seconde préoccupation majeure de la Chine est la pollution environnementale. La croissance spectaculaire du pays s’est faite aux dépens de l’environnement et, aujourd’hui, les questions de protection de la nature constituent un défi majeur pour toute perspective de développement. De fait, le pays est fréquemment confronté à des problèmes environnementaux : pluies acides, pollution atmosphérique, pollution de l’eau, dégradation des sols, aridité, voire désertification dans le Nord, enfin déforestation. Tous ces phénomènes sont susceptibles d’être amplifiés par le changement climatique, ce qui pose un sérieux problème de sécurité sanitaire au gouvernement chinois. Pour certains experts nationaux tels que Zhang Haibin, le changement climatique constitue un véritable problème de sécurité nationale. Le gouvernement ne peut rester insensible aux risques d’un tel phénomène, à plus forte raison quand certains de ses effets se font déjà ressentir : effondrement des glaciers du plateau tibétain ou augmentation de la fréquence des tempêtes dans le Sud-Est.
Le plan quinquennal 2011-2015
Soucieux de réconcilier développement et environnement, le gouvernement chinois a révélé à la presse internationale les grandes lignes de son nouveau plan quinquennal pour la période 2011-2015. Présenté comme « le plus vert des plan quinquennaux », ce document a été approuvé par le Congrès national. Il contient de véritables objectifs « verts », en continuité avec ceux du plan précédent, et vise à confirmer les mesures de réduction des émissions présentées lors du sommet de Copenhague et confirmées à Cancun. Le gouvernement a ainsi prévu de poursuivre sa croissance économique au taux annuel de 7 % tout en diminuant sa consommation énergétique de 16 % et en réduisant de 17 % l’intensité carbone par unité de PIB. En outre, il entend porter la part des énergies renouvelables à 11,4 % en 2015 et envisage d’augmenter sa surface forestière de 21,66 %. La principale nouveauté de ce plan est qu’il mentionne, pour la première fois, le changement climatique en le citant comme l’une des priorités fondamentales du pays, au même titre que la sécurité énergétique. Pour la première fois aussi, le gouvernement a dédié un paragraphe aux engagements de la Chine dans les négociations internationales pour le changement climatique ainsi qu’à la coopération internationale en la matière. Elle a également mis au nombre de ses préoccupations la nécessité de contrôler ses émissions de carbone en expérimentant un système de vente de permis d’émission entre régions chinoises.
Il est donc clair que ce plan fait une large place à la question du développement durable, qui doit nécessairement accompagner la croissance économique du pays. Toutefois des voix critiques ne manquent pas de s’élever, affirmant que ce plan n’est pas suffisamment ambitieux. En effet, si l’on se réfère au plan précédent qui prévoyait une réduction de 20 % de la consommation énergétique, les 16 % prévus pour la période 2011-2015 semblent modestes. Toutefois, l’objectif ambitieux d’une réduction de 20 % a été atteint par le pays au prix de grands sacrifices. Plusieurs gouvernements locaux, qui ne s’y étaient pas du tout préparés, ont dû prendre, à la fin du XIe plan quinquennal, des mesures drastiques pour atteindre les quotas qui leur avaient été imposés. Ces mesures allaient de la fermeture totale des entreprises peu efficaces en matière d’économies d’énergie à la coupure partielle de l’alimentation électrique à l’industrie et aux civils y compris, dans certaines provinces, aux hôpitaux. Pékin a déduit de cette expérience que se fixer des objectifs moins ambitieux mais plus encadrés constituerait une option plus réaliste. Cela donnerait le temps de trouver des solutions spécifiques et moins radicales, tout en acquérant une certaine expertise qui pourrait aider à atteindre à l’avenir des objectifs plus ambitieux, mais aussi encourager d’autres pays émergents à s’engager sur la voix d’un développement durable.
II. Politiques de transports au regard du changement climatique
Etat des lieux et enjeux
La population urbaine est passée de 26 % en 1990 à 50 % en 2010 et la consommation d’énergie a cru de 6 % par an entre 1980 et 2006. Cette croissance extrêmement rapide a conduit à une expansion spatiale des villes très importante et par suite à un allongement des distances de déplacement très défavorable aux modes traditionnels de la marche à pied et du vélo (Pékin : 9,3 km en 2005, + 16 % depuis 2000, + 55 % depuis 1986). La croissance des véhicules automobiles était donc inéluctable : 1 millions en 1990, 61 millions en 2010, une augmentation de 10 % par an au cours des dix dernières années. L’usage des transports publics a également beaucoup progressé (8,9 % par an à Pékin), notamment le rail. Par contre l’usage des taxis a régressé. Soutenu par les incitations financières, le nombre de deux roues électriques a été multiplié par 10 entre 1998 et 2001. Il s’en est vendu 20 millions en 2006 pour atteindre le nombre total de 45 millions.
Les bonnes pratiques internationales
Le rapport de la banque asiatique de développement recense les bonnes pratiques observées dans le monde : législations et mécanismes de financement pour soutenir les transports publics, renforcement de la planification des transports, facilitation de l’usage des taxis, tarification des transport en vue d’accroître leur efficacité énergétique, normalisation des véhicules au regard de l’énergie et des émissions de CO2, planification de l’usage du sol, régulation de la demande de transport (péages urbains, auto-partage, stationnement, gestion du trafic), promotion des modes doux.
Expériences urbaines en Chine
Le rapport de l’ADB passe ensuite en revue les expériences les plus significatives déjà observées en Chine :
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Restrictions temporaires mises en place à Shenzhein en 2004, à Pékin en 2008 (en fonction des plaques d’immatriculation), zones ou rues piétonnes à Shanghai et Beijing.
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Normes d’émission et labels à Beijing en 2001 puis 2008 (Euro 4)
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Quotas de nouveaux véhicules à Shanghai en 2000 (marché des plaques)
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Incitations économiques pour les véhicules électriques, hybrides ou à pile à combustible : 13 villes pilotes depuis 2009.
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Planification des transports : Bus à haut niveau de service (Bus Rapid Transit), à Kunsming dès 1999 (40 km de lignes aujourd’hui).
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Actions d’information et de communication sur la conduite écologique ou l’autopartage.
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Promotion et soutiens à l’achat des deux roues électriques.
Sources
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La Chine face au changement climatique : puissance irresponsable ou engagée ? Le Monde.fr, 14 juin 2011, par Giulia Romano, assistante de recherche au CERI-Sciences Po/CNRS
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« Urban transport strategy to combat climate change in the People’s Republic of China ». Rapport de la Banque asiatique de développement, 2012.
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« Y-a-t-il une mobilité asiatique », Conférence Transit city, 4 octobre 2013