Politiques et actions dans trois villes d’Europe : Hambourg, Vittoria Gasteiz, Bristol
2013
Cette fiche s’intéresse à plusieurs villes particulièrement actives dans la lutte contre le changement climatique, notamment par leurs actions dans le secteur des transports. Ces trois villes européennes (Hambourg, Vittoria Gasteiz, Bristol) ont été choisies en raison de leur succès dans le concours européen annuel « European green capital ».
Le concours « European green capital »
Le concours European Green Capital fait suite à une initiative de 15 villes européennes (Tallinn, Helsinki, Riga, Vilnius, Berlin, Varsovie, Madrid, Ljubljana, Prague, Vienne, Kiel, Kotka, Dartford, Tartu, Glasgow) avec l’association des villes estoniennes en mai 2006. La vision commune élaborée sous forme d’un « Memorandum of understanding » fut reprise en 2008 par la Commission européenne avec un processus de concours annuel permettant de récompenser les villes ayant déjà atteint des standards élevés en matière d’environnement, ayant engagé un programme pour les améliorer encore et pouvant servir d’exemples pour les autres villes d’Europe.
Douze thèmes doivent être renseignés dans les dossiers de candidature :
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contribution à la lutte contre le changement climatique
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transports locaux
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espaces verts et usage des sols
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nature et biodiversité
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qualité de l’air local
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environnement acoustique
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déchets
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eau potable
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traitement des eaux usées
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éco-innovation et emploi durable
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management de l’environnement au sein de la municipalité
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performances énergétiques
Les villes lauréates ont été successivement Stockholm en 2010, Hambourg en 2011, Vitoria-Gasteiz en 2012, Nantes en 2013, Copenhague pour 2014 et Bristol pour 2015. Les lauréats sont désignés avec deux années d’avance pour permettre d’organiser les différentes formes de communication et d’échanges d’expériences autour de la thématique concernée. Les informations ci-dessous sont extraites des deux premières sections des dossiers de candidature et des plaquettes de présentation réalisées après cette récompense.
1 - Hambourg (lauréat 2011)
Généralités
Hambourg est une ville de 1,8 millions d’habitants au sein d’une région urbaine 4,3 millions. C’est une ville-land (comme Berlin et Brème), une des 16 régions politiques de l’Allemagne fédérale. C’est une grande ville industrielle : son port est le 3e d’Europe, 121 millions de tonnes par an (en 2010, + 9,8 % sur un an), 11 000 bateaux y transitent chaque année et 150 000 emplois y sont liés. Plus de 500 entreprises industrielles sont actives à Hambourg.
Sur le plan environnemental le cas de Hambourg est particulièrement intéressant du fait de la dimension industrielle de la ville et donc de l’enjeu de concilier développement économique et préservation de l’environnement. De fait, Hambourg a une politique de développement durable depuis 1990.
Contribution à la lutte contre le changement climatique
Un programme a été approuvé en 2007 (Stategy for climate protection) avec l’objectif de diminuer les émissions de CO2 de 40% en 2020 (moins 15% déjà réalisé entre 1990 et 2006) et de 80% en 2050. Dix domaines d’action ont été définis pour cela, avec 45 mesures et 22,5 millions d’euros d’investissements publics par an A ces fonds s’ajoutent les fruits d’une politique active de partenariat public-privé : le programme « Entreprises pour la protection des ressources » (pour 1 euro public, 10 euros privés) comprend déjà 1000 projets pour un investissement privé de 146 millions d’euros. La baisse qui en résulte pour les émissions industrielles de CO2 est d’environ 134 000 tonnes par an.
Politique et actions dans le domaine des déplacements pour une réduction des émissions de CO2
La stratégie de lutte contre le changement climatique dans le secteur des déplacements s’appuie sur les actions et infrastructures suivantes :
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un réseau vert pour les loisirs, les déplacements doux et la biodiversité.
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un programme d’amélioration du confort pour la marche à pied avec un objectif particulier de report modal pour les déplacements inférieurs à 1,5 km
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un programme de développement du vélo « Strategy for promoting bicycle traffic in Hamburg » (2008) avec 80 mesures relatives au développement du réseau (1800 km de pistes cyclables + 400 km de chemins non asphaltés pour loisirs et domicile-travail, pour 3 900 km de voies routières dont 45 % limitées à 30 km/h), la facilitation des déplacements combinés (« Bike and ride ») et des vélos en libre-service depuis juillet 2009 (1000 vélos, 71 stations). La part modale du vélo a augmenté de 60 % entre 1984 et 2006, elle était de 9 % en 2002, de 12 % en 2010 avec pour objectif de la faire passer à 18 % par l’augmentation du parc de vélos en libre-service (passage à 1500) et du nombre de stations (passage à 130).
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le développement du réseau de transport public : 99 % des résidents de la ville sont à moins de 300 m d’un transport public ; la liaison avec l’aéroport a été ouverte en 2008 ; une nouvelle ligne de métro ouverte en 2011 dessert notamment le nouveau quartier Halfen city (voir plus loin) ; depuis 2006 tous les nouveaux bus à motorisation thermique sont aux normes Euros 5 (voir fiche Europe no 5) et l’utilisation de carburants bas carbone est développée par le passage progressif à la motorisation hybride d’ici 2020 pour les bus articulés et le recours à l’hydrogène qui équipe déjà neuf bus et sera bientôt produit dans une station située sur le port à partir de l’énergie solaire et éolienne. La coordination des transports entre la Ville de Hambourg et son arrière-pays se fait depuis 45 ans au sein de la « Hamburg Transport Association ». Ces efforts de coordination ont permis, par exemple, une augmentation de fréquentation sur ce territoire de 15 % entre 2003 et 2007.
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une part modale du train très élevée dans le port : 70 % des conteneurs quittent Hambourg pour le continent par le train, pourcentage le plus fort du monde.
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une croissance urbaine organisée depuis le début du XXe siècle sur le modèle artériel (Hamburg arterial model) qui définit un centre principal et des centres secondaires, des artères principales et secondaires quasiment toutes desservies par le transport ferroviaire et le long desquelles l’urbanisation est privilégiée. Le développement urbain a été particulièrement intensif depuis 30 ans, avec notamment, dans les années en cours, une grande opération d’aménagement destinée à étendre le centre-ville de 40 % (Hafen City)
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enfin la mise à l’étude du péage urbain et d’une zone basse émission.
2 - Vittoria Gasteiz (lauréat 2012)
Généralités
Située au nord de l’Espagne, Vitoria Gasteiz est une ville de 240 000 hbs., la capitale du Pays basque espagnol. Sa croissance a été considérable dans les années 60 sous l’attraction des industries mécaniques et métallurgiques. Afin de préserver, malgré cette croissance, ses qualités de vie de ville moyenne, elle a engagé depuis 30 ans une forte politique environnementale, concrétisée notamment en 1998 par le premier agenda 21 local en Espagne. Aujourd’hui, sa réputation sur ce plan environnemental est due particulièrement à ses espaces verts : 45 m2 par habitant, une ceinture verte de 5 parcs reliés par 33 km de cheminements piétons et 90 km de pistes cyclables.
Une nouvelle stratégie environnementale a été adoptée en 2012, qui comporte 10 plans d’action.
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Protection et restauration des ressources naturelles sensibles
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Prévention des inondations
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Amélioration de la bio-capacité, de la biodiversité et du paysage urbain
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Mobilité et espace public
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Stratégie pour les déchets
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Réduction de la pollution urbaine
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Lutte contre le changement climatique
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Amélioration du cycle de l’eau
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Promotion d’une culture de la durabilité
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Restauration urbaine et amélioration foncière
Contribution à la lutte contre le changement climatique
Une stratégie de prévention du changement climatique a été adoptée en 2006, fixant un objectif de réduction de 16% des émissions de CO2 en 2012. En 2009 la municipalité adhère à la Convention des Maires (engagement à aller au-delà de l’objectif de l’Union Européenne de réduction de 20% en 2020) et en 2010 elle adopte un nouveau Plan de lutte contre le changement climatique portant l’objectif de réduction des émissions de CO2 à 25% en 2020 et 50% en 2050 (référence 2006) avec une réduction en 2020 de 46% pour les activités proprement municipales. Le budget attribué à ce plan est de 47 millions d’euros pour la période 2006-2012 dont 27 millions d’euros pour les transports. Une grande partie des mesures transport est développée dans le cadre du projet Civitas « Modern ».
Transports
Les émissions de gaz à effet de serre dues au transport ont augmenté de 2,25 tonnes CO2 par habitant en 2000 à 2,81 t/h en 2006. Face à ce constat, la municipalité a mis en place un « Plan mobilité durable et espace public 2008-2012 » dont les principales mesures sont les suivantes.
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Amélioration des transports en communs : deux lignes de tramway, restructuration du réseau (2009), infrastructures pour priorité bus,
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Promotion du vélo : nouvelles pistes cyclables, vélos gratuits en libre-service (17 stations et 350 vélos en 2011)
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aménagements piétons (25% de l’espace)
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efficacité énergétique des activités municipales : développement du biofuel, feux tricolores, éclairage public (9 000 ampoules passées en Led)
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développement urbain autour du concept « Ville compacte et verte », malgré une croissance de 7 % par an depuis 2000 : déjà, en 2012, 81 % de la population vit dans un rayon de 1500 m du centre-ville et 95 % a accès aux services de base (éducation, santé, culture) à moins de 500 m. D’où 50 % des déplacements à pied, 28,3 % en voiture
3 - Bristol (lauréat 2015)
Généralités
Bristol est une ville du Royaume Uni de 428 000 habitants, au cœur d’une région urbaine de 1,1 millions d’habitants. Sa population a cru de 10% entre 2000 et 2010 alors que son activité économique progressait de 40%.
Impliquée de longue date dans les enjeux environnementaux (candidate trois fois à European Green Capital), Bristol s’est engagée dans la lutte contre le changement climatique depuis les années 2000.
Contribution à la lutte contre le changement climatique
Bristol a joué un rôle pilote dans le programme national « Cities for climate protection » et fût la première ville à adopter une stratégie de réduction des émissions de CO2 : - 60% en 2050 par rapport à 1990. En 2009, Bristol rejoint la Convention des maires et se donne des objectifs encore plus ambitieux : - 40% de CO2 en 2020 et - 80% en 2050.
Aujourd’hui Bristol émet 4,7 t de CO2 par habitant pour une moyenne au Royaume Uni de 6,6 t et pour les grandes villes de 5,6 t. Ces émissions proviennent pour 2,22 t de la consommation d’électricité, pour 1,55 t de l’usage d’énergies fossiles hors transports et pour 0,97 t pour les transports. Ces émissions ont été réduites de 19% entre 2005 et 2010 contre 12% pour l’ensemble du Royaume Uni. Ces progrès ont été obtenus par des actions directes ou indirectes sur les bâtiments publics, l’éclairage public, le développement de l’énergie éolienne et de la biomasse, les transports, l’industrie et le commerce, l’habitat (efficacité énergétique + 15% grâce à un programme de rénovation de 20 000 logements et la sensibilisation des résidents) et la planification urbaine.
La réduction des émissions de CO2 dans le secteur du transport
La réduction des émissions de CO2 dans les transports a atteint 12 % entre 2005 et 2010, 32 % pour la seule activité municipale (nouveaux véhicules, planification des déplacements, conduite économique).
Les actions municipales sont désormais organisées dans le cadre du Plan de déplacement 2011-2016 (Joint Local Transport Plan) adopté conjointement par les 4 municipalités de la région urbaine. Ce plan poursuit 5 objectifs : réduire les émissions de CO2, soutenir la croissance économique, développer l’accessibilité, améliorer la sécurité, la santé et la sûreté, améliorer la qualité de vie.
Les actions de la ville de Bristol font l’objet d’un plan d’investissement triennal en cours de 42 millions de livres qui comporte les lignes suivantes :
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réduction de la demande de transport (30 millions de Livres)
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réduction de la circulation urbaine : restrictions de stationnement, partage de l’espace, limitations de vitesse (20 miles soit 32 km/heure). Résultats déjà obtenus pour le transport routier qui représente 27 % de l’utilisation de l’énergie, 20 % des émissions de CO2 (1 tonne par habitant). : – 15 % pour la ville de Bristol entre 2005 et 2010, -12 % pour la région urbaine.
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développement des transports publics : compléments au réseau de bus (195 ML), 10 lignes de bus rapides (Bus à Haut Niveau de Service en France, Bus Rapid Transit aux Etats-Unis) avec priorité aux feux, information en temps réel, nouveaux véhicules, compléments aux transports ferroviaires (100 ML), promotion de la marche à pied et du vélo (24 ML), développement des technologies de l’information et de la communication, implantation de bornes de recharges pour véhicules électriques.
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développement du vélo : Bristol est officiellement ville pilote pour le Royaume Uni
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amélioration du cadre légal d’intervention de la Ville : transport public routier et ferroviaire sont privé et les investissements publics sont pilotés par le gouvernement dans le cadre de compétitions entre les villes. Bristol a obtenu en juillet 2012 un plan d’investissement de 10 ans à partir de 2014 et des pouvoirs nouveaux pour orienter la planification des transports.